Comment le gouvernement des États-Unis utilise les réseaux sociaux pour intervenir au Venezuela (Jacobin Mag)

Par Tim Gill et Christian Lewelling

Photo: pour les élections du 21 novembre 2021, 130 organisations sont en lice pour 23 gouverneurs/335 maires, y compris les partis de droite défaits dans leurs plans putschistes. Des 70.000 candidat(e)s au scrutin du 21 novembre, 80 % sont d’opposition. Le parti chaviste fut le seul à organiser des primaires. (Note de Venezuelainfos)

La prétendue « ingérence russe » dans les élections états-uniennes avait suscité une « indignation » largement relayée par les médias. Mais les documents obtenus par Jacobin révèlent que les États-Unis sont intervenus (avec l’argent des contribuables) dans les élections vénézuéliennes en formant les forces de droite à utiliser Facebook contre le mouvement chaviste soutenant le président Nicolás Maduro. Notamment lors des élections législatives en 2015 qui avaient permis la victoire de la droite (et le redémarrage des insurrections d’extrême droite que les médias avaient relookées en « révoltes populaires », Note de Venezuelainfos).

Ces derniers mois, les législateurs états-uniens ont condamné Facebook pour avoir nui à la santé des enfants, amplifié la violence de Washington jusqu’à l’Inde et diffusé des informations erronées sur le COVID-19 et son vaccin. Ces critiques font suite à la fuite de milliers de documents internes de l’entreprise, connus sous le nom de « Facebook Papers« , qui révèlent qu’en dépit de la connaissance du rôle de ses produits dans le développement d’une série de comportements toxiques, Facebook a refusé de prendre des mesures significatives en réponse à cette situation, faisant passer ses profits avant la santé sociale.

Pourtant, alors que les législateurs exploitent les retombées politiques de la fuite pour intensifier leurs attaques contre le géant technologique, les contribuables pourraient également être intéressés de savoir que le gouvernement états-unien a financé des programmes visant à aider les partis politiques d’opposition et les militants à utiliser Facebook pour saper les gouvernements étrangers. Le Venezuela en est un bon exemple.

Après la mort du président socialiste vénézuélien Hugo Chávez, le National Democratic Institute – un organe indépendant du gouvernement américain créé pour financer et soutenir les partis politiques à l’étranger d’une manière plus formelle que la Central Intelligence Agency – a financé des membres de l’opposition vénézuélienne, notamment pour qu’ils utilisent le géant des médias sociaux afin de mobiliser leurs partisans et de pousser les partisans du gouvernement socialiste vers « l’autre bord ». Nous avons récemment obtenu des documents du gouvernement états-unien en vertu de la Loi sur la liberté d’information (FOIA) qui illustrent la manière dont le gouvernement a élaboré un programme axé sur l’utilisation de Facebook pour aider l’opposition vénézuélienne lors des élections municipales en 2013 et des élections législatives en 2015 (qui ont vu la victoire de la droite). Ces documents montrent, en d’autres termes, que le gouvernement états-unien utilise activement les médias sociaux pour s’ingérer dans les élections d’autres pays.

La crise de Facebook

Des activistes à travers le monde entier ont utilisé Facebook, Twitter et d’autres médias en ligne pour transmettre des messages, coordonner des manifestations et même faire tomber des gouvernements. Compte tenu de l’importance de Facebook en particulier, la pression s’est accrue pour réglementer la messagerie sur le site. Les législateurs américains, par exemple, ont reproché à la société de ne pas avoir pris de mesures contre les campagnes de désinformation présumées de la Russie visant à semer le chaos et à influencer les élections aux États-Unis. En outre, nombreux sont ceux qui ont dénoncé l’incapacité de la société à sévir contre les activistes soutenant Trump qui prétendaient que les élections de 2020 étaient frauduleuses et qui ont utilisé le site pour organiser l’assaut du Capitole par l’extrême droite, le 6 janvier 2021 à Washington, DC.

Dans le sillage des Facebook Papers, les législateurs américains ont relancé leurs critiques à l’égard du géant de la technologie. Les documents révèlent que les dirigeants de Facebook savaient que les « mécanismes de base » (c’est-à-dire les algorithmes) de leurs plateformes conduisent les utilisateurs vers les publications les plus sensationnelles, les plus controversées et les plus polarisantes dans leur fil d’actualité, ce qui entraîne une série d’effets socialement toxiques.

Par exemple, les documents révèlent qu’en dépit de recherches internes prouvant que l’application Instagram de l’entreprise nuit à l’estime de soi des enfants, les dirigeants de Facebook ont poursuivi leurs projets de développement d’une application similaire pour les enfants de moins de treize ans – et n’ont arrêté ces projets que deux semaines après la révélation des Facebook Papers. Les documents décrivent également l’inquiétude croissante des dirigeants de l’entreprise quant à l’impact social plus large de la plateforme, qui va de la facilitation de la violence politique et de la diffusion de la désinformation COVID-19 à son utilisation par les cartels de la drogue, les trafiquants d’êtres humains et les groupes armés pour engager des tueurs à gages, documenter des meurtres, réduire des femmes en esclavage et promouvoir le génocide dans des pays comme le Myanmar.

Les documents montrent que, en réponse, les dirigeants de Facebook ont privilégié les profits en refusant de prendre des mesures concrètes – optant plutôt pour des tactiques de gestion des relations publiques – par crainte que la modification de leurs algorithmes ne réduise l’engagement des utilisateurs et donc la croissance de la plateforme.

Le résultat a été la pire crise politique de l’histoire de l’entreprise (au moins depuis Cambridge Analytica), incitant l’entreprise à annoncer un changement de marque. Les législateurs tant démocrates que républicains ont capitalisé sur la crise pour fustiger davantage Facebook, signalant même un soutien bipartisan pour une réglementation accrue du géant de la technologie.

La sénatrice Marsha Blackburn (R-TN), par exemple, a déclaré : « Il est clair que Facebook privilégie le profit au détriment du bien-être des enfants et de tous les utilisateurs » alors que le sénateur Richard Blumenthal (D-CT) a suggéré qu’il s’agissait peut-être du « moment Big Tobacco » de Facebook, faisant référence à l’indignation et à la diminution du tabagisme aux États-Unis après les révélations des machinations de l’industrie pour semer le doute sur les effets négatifs de ses produits sur la santé.

Il est quelque peu amusant d’entendre des sénateurs états-uniens exprimer leurs préoccupations quant à l’orientation d’une entreprise vers la recherche du profit dans une société capitaliste – surtout lorsque plusieurs d’entre eux possèdent des millions d’actions de Big Tech. Mais quelles que soient les critiques que les politiciens états-uniens formulent à l’égard de l’impact de Facebook dans leur pays, le gouvernement des États-Unis n’hésite pas à utiliser Facebook pour promouvoir ses propres politiques impérialistes à l’étranger.

Un plan d’intervention financé par les États-Unis

À partir d’octobre 2013, la National Endowment for Democracy (NED) – une agence gouvernementale créée par l’administration Reagan – a versé près de 300.000 dollars au National Democratic Institute (NDI) pour un programme intitulé Venezuela : Improved Training and Communications Skills for Political Activists. Le NDI a également été fondé sous l’administration Reagan, en tant que bras international du parti démocrate aux côtés de son homologue du GOP, l’International Republican Institute. Les deux groupes travaillent toutefois souvent de concert et soutiennent bon nombre des mêmes acteurs et objectifs à l’étranger.

La NED reste l’agence-mère des deux groupes et reçoit la quasi-totalité de son financement des contribuables. Bien que la NED et le NDI revendiquent leur indépendance vis-à-vis du gouvernement américain, ils doivent tous deux rendre compte de leurs activités au Congrès, qui restent soumises aux demandes de FOIA.

« L’indignation suscitée par la prétendue intervention russe dans les campagnes électorales états-uniennes n’a pas cessé. Pourquoi, alors, est-il permis au gouvernement des États-Unis de s’engager dans un comportement explicitement partisan à l’étranger ? »

Dans la description du programme, la NED affirme que le gouvernement vénézuélien a cherché à contrôler les « médias de masse » du pays, les utilisant comme un outil pour contraindre ses citoyens (ce qui est faux: l’opposition et le secteur privé comme dans quasi tous les pays du monde, possède la plupart des médias). En conséquence, la NED rapporte que les opposants et les « militants politiques ont des difficultés particulières à communiquer avec les citoyens ainsi qu’à organiser et à mobiliser des partisans ». En revanche, la NED décrit les médias sociaux comme « moins vulnérables aux restrictions gouvernementales et … un outil utile pour les activistes politiques indépendants au Venezuela pour diffuser des messages et s’organiser ».

Alors que la NED décrit soigneusement ces militants comme indépendants, il est clair que ce programme a été conçu pour les militants et les membres de partis associés à l’organisation de la droite, la Table ronde de l’Unité Démocratique, ou MUD (Mesa de la Unidad Democrática).

Formée en 2008, la MUD reste le plus grand bloc de partis d’opposition au Venezuela, cherchant à unifier les partis d’opposition existants derrière un candidat de consensus contre les membres du Parti socialiste du Venezuela (PSUV), le parti de Chávez et de Maduro, lors des compétitions électorales. Parmi ses principaux partis figurent Primero Justicia, La Causa Radical, Un Nuevo Tiempo et Voluntad Popular, dont Juan Guaidó – le leader de l’opposition soutenu par les États-Unis qui a tenté de renverser Maduro de manière non démocratique, y compris par la force, et que certains pays reconnaissent comme le leader légitime du Venezuela – fait toujours partie.

Après la mort de Chávez en mars 2013, puis la victoire aux élections présidentielles de son successeur Nicolás Maduro le mois suivant, l’opposition a commencé à élaborer des stratégies pour les élections municipales de décembre 2013 et, tout aussi important, les élections législatives de 2015. La NED raconte que si les médias sociaux restent essentiels à l’organisation politique contemporaine, l’opposition n’était pas équipée dans « l’utilisation des médias sociaux et d’autres technologies de l’information et de la communication (TIC)« .

En réponse, le NED a financé le NDI pour fournir plusieurs services à l’opposition vénézuélienne.

Tout d’abord, le NDI a planifié et accueilli « un séminaire en dehors du Venezuela sur l’utilisation de la technologie et des médias sociaux pour la sensibilisation et l’engagement des citoyens ». En outre, le NDI a créé une « boîte à outils virtuelle » hébergée sur un site respectif intitulé Red Innovación, un site également financé par le NED, offrant « un cours en ligne personnalisé de renforcement des capacités sur une série de questions relatives à l’innovation politique ». Le site et ses cours restent actifs.

Après les élections municipales de décembre 2013, le personnel du NDI a organisé une « session de révision de la stratégie » avec des membres de l’opposition « afin de développer des stratégies à plus long terme pour maintenir le contact avec les citoyens et améliorer leur capacité à communiquer et à diffuser des informations en utilisant les TIC. » En outre, le NDI a engagé un consultant « pour assurer un encadrement continu des participants au programme ».

Après la mise en œuvre de son programme, le NDI a discuté de ses résultats sur son site Internet. Et a considéré ce programme comme une étude de cas de réussite.

Grâce au financement et à la formation du NDI, la MUD a « mobilisé une base de données d’électeurs qui a identifié et ciblé les électeurs influents par le biais des médias sociaux » et, en effet, en décembre 2015, la droite a remporté la majorité à l’Assemblée nationale vénézuélienne pour la première fois depuis l’arrivée au pouvoir de Chávez en 1999. Le NDI décrit comment la MUD a créé une base de données d’électeurs, ce qui lui a permis « d’extrapoler des conclusions sur les penchants des partis politiques pour de grandes parties de l’électorat… en calculant la probabilité qu’un électeur soit un partisan du PSUV, un partisan de la MUD ou un électeur de tendance. »

Le MUD a ensuite créé deux groupes : ceux qui penchent pour le MUD (groupe A) et ceux qui penchent pour le PSUV (groupe B). Par la suite, le NDI décrit la manière spécifique dont la MUD a utilisé Facebook pour atteindre ces groupes :

la MUD a mené sa campagne de médias sociaux sur Facebook, qui a ciblé les électeurs avec différents messages tenant compte de leurs penchants politiques. La MUD a ciblé les électeurs du groupe A avec des messages d’incitation au vote, tandis qu’elle a ciblé le groupe B avec des informations sur les candidats du PSUV afin de les inciter à se rallier à son parti. En utilisant sa base de données, la campagne a également identifié 8,5 millions d’électeurs sur Facebook et les a ciblés avec des messages spécifiques similaires. Les mesures de Facebook ont indiqué que les messages ciblés touchaient plus de personnes que les campagnes précédentes. Le jour de l’élection, la campagne avait atteint 6,3 millions d’électeurs et 2,9 millions d’électeurs avaient interagi au moins une fois avec le contenu de la campagne sur Facebook.

Au final, le NDI s’attribue le mérite du succès de l’opposition, écrivant que cette stratégie « a finalement joué un rôle important dans leur victoire éclatante aux élections de 2015 » et qu’un « facteur déterminant dans le succès de la coalition aux élections législatives de 2015 a été un effort de deux ans avant les élections pour sensibiliser, former et aligner les structures nationales et régionales de communication de tous les partis qui conforment la MUD » (les italiques sont de nous). En effet, le NDI a organisé cet  » effort de deux ans  » pour former les membres de la MUD à l’utilisation des médias sociaux dans sa campagne contre le PSUV, comme détaillé dans la subvention qu’ils ont reçue du NED.

Ni le personnel de la NED ni celui du NDI n’ont répondu à nos demandes de commentaires.

Une longue histoire d’intervention états-unienne

Il n’est pas surprenant que le gouvernement américain finance un tel programme. Les États-Unis ont une longue – et sanglante – histoire d’intervention dans le monde, en particulier en Amérique latine. Ils ont même cherché à créer une nouvelle plateforme de médias sociaux à Cuba afin de déposer le gouvernement. Et au Venezuela, au cours des deux dernières décennies, le gouvernement des États-Unis n’a cessé de chercher à renverser Chávez et maintenant Maduro. Pourtant, ces stratégies ont finalement échoué, illustrant certaines des limites de l’impérialisme américain.

Pour beaucoup, le gouvernement vénézuélien est sans aucun doute devenu plus autoritaire sous la direction de Maduro. Mais en fin de compte la question que soulèvent ces documents récemment obtenus n’est pas de savoir si Maduro est « bon » ou « mauvais », mais si les contribuables américains devraient financer et former les membres de l’opposition vénézuélienne à utiliser Facebook pour leurs campagnes politiques de droite.

En effet, l’indignation suscitée par la prétendue intervention russe dans les campagnes électorales des États-Unis n’a pas cessé. Pourquoi, alors, est-il permis au gouvernement des États-Unis d’adopter un comportement explicitement partisan à l’étranger ? Pourquoi le gouvernement des États-Unis a-t-il le feu vert – malgré sa longue histoire de violence – pour intervenir dans les processus politiques d’autres pays ?

Tim Gill est professeur adjoint de sociologie à l’Université du Tennessee.

Christian Lewelling est étudiant en doctorat au Département de Sociologie de l’Université du Tennessee, Knoxville.

Source de cet article : https://jacobinmag.com/2021/10/us-venezuela-election-campaign-intervention-influence-maduro-mud-social-media-facebook

Traduction de l’anglais: Thierry Deronne

URL de cet article : https://venezuelainfos.wordpress.com/2021/10/31/comment-le-gouvernement-des-etats-unis-utilise-les-reseaux-sociaux-pour-intervenir-au-venezuela-jacobin-mag/

Peut-il exister un réseau social latino-américain ?, par Anne-Dominique Correa

L’autrice: Anne-Dominique Correa est journaliste indépendante. Elle a étudié Science-Po à Paris.

Lors de sa conférence de presse matinale du 20 janvier, le Président Andres Lopez Obrador mettait en garde les Mexicains contre les liens de Twitter avec l’aile droite du pays. « Le directeur de Twitter au Mexique était un militant ou un sympathisant très proche du PAN – Partido Accion Nacional (…) c’est important parce qu’au-delà des institutions ou des organisations, ou disons Twitter ou Facebook, il faut voir qui gère ces institutions, qui ils sont, parce que vous qui êtes journalistes savez qu’il est très, très difficile qu’il y ait une neutralité » déclarait-il.

Peu après la déclaration d’Andres Manuel Lopez Obrador (AMLO), le « King Twitero« , un compte appuyant le gouvernement, dénonça le fait que lorsqu’un nouveau compte Twitter est ouvert, la plateforme propose de suivre des politiciens du PAN.

Les représailles ne se firent pas attendre. Dans les jours qui suivirent, Twitter a non seulement suspendu le compte du « King twitero » mais aussi ceux de deux autres partisans du gouvernement suivis par des dizaines de milliers de followers, prétendument pour « violation des règles de la plateforme en matière de spam et de manipulation« . Ces fermetures ont suscité l’indignation des usagers pro-AMLO, devenue virale avec les hashtags #TwitterEsPanista et #Twitter Censura.

Les réseaux sociaux ne semblent plus être aussi « bénis » comme les qualifiait AMLO lorsqu’il a fêté son triomphe à l’élection présidentielle dans la nuit du 1er juillet 2018. À l’époque, Andres Manuel Lopez Obrador avait remercié les réseaux de lui avoir permis de contourner la censure des consortiums médiatiques pour s’adresser directement à son électorat pendant sa campagne. Trois ans plus tard, la romance a pris fin. Dans l’une de ses conférences de presse, AMLO a accusé les réseaux d’être devenus « la Sainte Inquisition de notre époque« .

Ce n’est pas la première fois que les réseaux sociaux font taire les voix progressistes dans la région. Le 12 avril 2019, la plateforme a fermé définitivement la page de l’ancien président équatorien Rafael Correa (1,5 million de followers). En septembre de la même année, Twitter a bloqué plusieurs journalistes et médias à Cuba sans justification. Un an plus tôt, le réseau avait également suspendu momentanément le compte de l’ancien candidat de gauche à la présidence colombienne, Gustavo Petro (1,4 million d’abonnés), et ce ne sont là que quelques exemples.

Le progressisme divisé sur l’idée de régulation

La censure des comptes pro-AMLO a finalement réveillé le progressisme face au pouvoir croissant des réseaux. Sans accord, cependant, sur la stratégie à adopter pour l’enrayer.

Le 1er février, Ricardo Monreal, leader de MORENA (le parti du président mexicain), a proposé un projet de loi visant à réglementer les réseaux qui comptent plus d’un million d’utilisateurs au Mexique (Twitter, Facebook, Instagram, YouTube et TikTok). « La seule façon correcte de protéger le droit humain de la liberté d’expression dans le cyberespace est de légiférer » a-t-il déclaré.

L’initiative prévoit que toute personne dont le compte est bloqué peut s’opposer à la décision et exiger une réponse du réseau dans les 24 heures. Si les utilisateurs ne reçoivent pas de réponse positive dans leur cas, ils peuvent faire appel à l’Institut fédéral des télécommunications (IFT), puis aux tribunaux mexicains. Si la suspension est jugée arbitraire, le réseau pourrait payer une amende allant jusqu’à 4,4 millions de dollars.

Le président Lopez Obrador, cependant, n’a pas été convaincu par cette proposition. « Ces questions [la réglementation] sont controversées » a-t-il expliqué.

Faisait-il référence à l’expérience des gouvernements de Cristina Kirchner en Argentine et de Rafael Correa en Équateur en matière de régulation des médias ? Les deux gouvernements ont créé des lois (la loi sur les médias en Argentine et la loi sur la communication en Équateur) pour briser le monopole des médias par le secteur privé. Dans les deux cas, on a qualifiés ces lois de « bâillons » et leurs gouvernements d' »ennemis de la liberté d’expression« , même si les lois n’ont jamais été pleinement appliquées.

En tout état de cause, les nouveaux gouvernements progressistes excluent fermement l’option réglementaire. « Je suis en faveur de ne pas réglementer ce qui a trait aux médias (…) qu’il n’y ait pas de mécanisme de régulation, pas de censure » a déclaré Lopez Obrador pour justifier son opposition à la proposition de Monreal. « Il est interdit d’interdire« , a-t-il ajouté.

De même, le président argentin Alberto Fernandez a estimé que la loi sur les médias « n’était pas le moyen » de promouvoir une plus grande pluralité dans les médias. Selon le président, « pour multiplier [les voix], il y a beaucoup de recours et ils n’ont pas besoin d’une loi sur les médias : il y a la défense de la concurrence, la protection des consommateurs, ce sont des mécanismes qui permettent de multiplier les voix« . Cette rhétorique mercantile marque une rupture avec la vision de sa prédécesseuse Cristina Kirchner, qui définissait l’information comme une activité « d’intérêt public » et ne saurait donc être confiée aux seules entreprises privées.

Vers un réseau social régional ?

L’opposition d’AMLO à la loi de Monreal ne signifie pas que le président ait l’intention de rester les bras croisés face au pouvoir croissant des réseaux. Comme alternative à la réglementation, le président a proposé une autre initiative qui pourrait réconcilier les deux côtés du progressisme dans la région : la création d’un réseau social public.

La conception de la nouvelle application a été confiée fin janvier au Conseil national de la science et de la technologie (Conacyt), ainsi qu’aux ministères de l’intérieur et des affaires étrangères. Le gouvernement n’a pas précisé à quelle date le réseau est prévu, ni donné de détails supplémentaires sur la forme qu’il prendrait.

Une idée naïve ? Les réseaux sociaux sont des entreprises monopolistiques par essence. Pour qu’un réseau social puisse concurrencer Facebook, il doit atteindre une masse critique d’utilisateurs qui abandonnent ensuite la plateforme de Zuckerberg. Toutefois, le succès du réseau social public russe VK créé en 2007, surnommé « le Facebook russe« , prouve que ce n’est pas impossible. En 2020, VK est devenu le réseau social le plus populaire du pays en termes de messages échangés.

Cependant, pour augmenter le nombre potentiel d’utilisateurs du réseau proposé par AMLO, « il serait préférable que l’initiative soit régionale » estime Luis Angel Hurtado, expert en réseaux sociaux à l’UNAM.

Selon le chercheur, lors d’une réunion avec d’autres dirigeants de la région, l’ancienne présidente brésilienne Dilma Rousseff avait appelé à la création d’un réseau social pour le Cône Sud peu avant d’être destituée. Mais la proposition ne s’est jamais concrétisée, car « (…) elle a perdu de son intérêt en raison du processus de destitution de Dilma Rousseff et du changement de gouvernement au Brésil » a déploré M. Hurtado.

La proposition de Lopez Obrador pourrait être l’occasion de reprendre cette initiative. De cette manière, le progressisme pourrait garantir un espace de discussion libre, ce que le premier « virage à gauche » n’avait pas permis de réaliser.

En effet, les lois sur la communication de Kirchner et de Correa n’ont pas survécu au tournant conservateur. Quelques semaines après leur arrivée au pouvoir, les gouvernements néolibéraux de Lenín Moreno et Mauricio Macri ont abrogé leurs articles les plus importants. Les deux dirigeants ont démantelé les médias publics créés par leurs prédécesseurs. Ces violations de la liberté d’expression n’ont pas fait grand bruit, car ces plateformes n’ont pas réussi à obtenir des taux d’audience élevés et avaient la réputation d’être des « porte-parole du gouvernement« .

La création d’un réseau social public régional pourrait empêcher que l’Histoire se répète. Atteindre une masse critique d’utilisateurs sur un réseau social est un véritable défi, mais s’il est relevé, il assurera également sa longévité. En d’autres termes, il serait plus difficile pour les gouvernements au pouvoir de s’en débarrasser. Qui peut imaginer une vie sans Facebook ou Twitter ? La force des réseaux réside dans le fait que, même si nous ne les aimons pas, nous continuons à les utiliser parce que nous en dépendons.

Anne-Dominique Correa

Source : https://jacobinlat.com/2021/05/02/puede-existir-una-red-social-latinoamericana/

Traduction : Thierry Deronne

URL de cet article : https://venezuelainfos.wordpress.com/2021/05/04/peut-il-exister-un-reseau-social-latino-americain-par-anne-dominique-correa/

Deux importants experts du Droit International dénoncent les vraies causes des migrations et des morts au Venezuela

Genève, 26 février 2020. « Les flux migratoires au Venezuela ont leur origine dans l’asphyxie financière, dans le blocus. C’est la cause et on veut l’ignorer, en rejetant la faute sur la victime » explique le professeur Alfred de Zayas, spécialiste du droit humanitaire, ex-expert de l’ONU qui a visité le Venezuela: « on peut dire qu’aujourd’hui plus de 100.000 vénézuélien(ne)s sont mort(e)s victimes des mesures unilatérales coercitives des Etats-Unis, des dizaines de milliers par manque de médicaments« .
Pour l’avocat Antonio Remiro Brotóns de l’Institut de Droit International et du Permanent Court of Arbitration: « la plainte du Venezuela à la Cour Pénale Internationale est justifiée: créer une famine, augmenter le nombre de morts pour renverser un régime, est un crime international« .

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Sources:
https://twitter.com/CancilleriaVE/status/1232749437501526025 
https://twitter.com/CancilleriaVE/status/1232760591607107591
https://twitter.com/CancilleriaVE/status/1232755688109158401 

URL de cet article: https://wp.me/p2ahp2-58M

« Ils ont brûlé vif mon fils parce qu’il était noir et chaviste »

L’alliance du suprémacisme Brasilia-Washington et de la globalisation médiatique a produit un genre nouveau de déstabilisation. Des “blitzkrieg” dont les acteurs jouent sur des espaces réduits et dans des temps limités, des « stories » destinées essentiellement à l’exportation. Le modus operandi est le suivant : des commandos de droite cherchent l’affrontement avec les forces de l’ordre… dont la réaction est guettée par les caméras du monde entier, arrivées sur place à l’avance. A New York ou à Berlin, les monteurs inverseront la chronologie de la scène: le “régime” réprime le “peuple”. Aucun journaliste n’analysera pourquoi les victimes sont plus nombreuses chez les militants de gauche, les passants et les forces de l’ordre. Encore moins pourquoi dans ces manifestants “pacifiques”, il y plus du planteur de Haïti qui jetait au four les mauvaises cuisinières noires, ou du porteur de torche du Ku Klux Klan, ou du terroriste de l’Etat Islamique, que du “combattant pour la liberté”.

Thierry Deronne, Caracas, 19 mai 2019

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Inés Esparragoza, mère d’Orlando Figuera, le jeune homme poignardé et brûlé vif à Caracas par les manifestants de droite en 2017. JAIRO VARGAS

par Jairo Vargas – 16/05/2019, pour Público (Espagne)

Le jeune Orlando Figuera est mort en 2017 après avoir été poignardé et brûlé par des manifestants de l’opposition lors de manifestations anti-gouvernementales au Venezuela. Deux ans après le crime, sa mère se souvient de l’affaire et appelle à la justice et à la paix dans son pays, où plusieurs affaires similaires ont conduit le gouvernement à légiférer contre les crimes de haine.

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Le jeune Orlando aspergé d’essence et brûlé vif dans le quartier chic d’Altamira.

Inés Esparragoza a du mal à fermer les yeux. « Ce n’est pas facile parce que la première chose que je vois quand je les ferme, c’est mon fils, comme ça », dit-elle. Elle aimerait se souvenir de lui d’une manière différente, et elle le fait presque toujours, mais il y a deux scènes qui se collent fermement à sa rétine. La première est celle de son fils aux soins intensifs de l’hôpital. « Quand j’ai ouvert la porte… je me suis dit : terre, avale-moi. Il était là, nu. Il a dit : Bénis-moi, maman. Il a mis sa bouche pour l’embrasser, mais je ne l’ai pas trouvée. Il était tout meurtri, avec un œil au beurre noir, un visage enflé et un corps plein de brûlures », décrit la femme parmi de longs silences pendant lesquels elle retient les pleurs mais pas les larmes. La deuxième image qui lui mord les yeux, elle l’a vue à la télévision, juste après les funérailles, après « ces 15 jours de pure agonie », le pire de ce qu’elle a pu subir en 44 ans de sa vie. « Orlando Figuera est mort », passaient en boucle les actualités du 4 juin 2017, alors qu’il montrait un corps en flammes courant sans but et sans espoir, cherchant de l’aide parmi la foule qui lui avait mis le feu. « C’est la seule fois que j’ai vu ces images. Ma petite-fille m’a dit : Oncle Orlando est à la télé ». Encore du silence et des larmes.

Le nom Orlando Figuera ne signifie sûrement rien en dehors du Venezuela. Même chose avec Victor Salazar. Cependant, l’image de ce dernier, également couvert de flammes lors d’une manifestation anti-Chaviste, a fait la première page des médias internationaux qui ont serré les rangs pour condamner la répression du gouvernement de Nicolás Maduro contre la mobilisation de l’opposition en 2017. La photographie de Salazar, prise par le photographe vénézuélien Ronaldo Schemidt, qui vit au Mexique, a été distribuée dans le monde entier par l’AFP. Il lui a valu le prestigieux World Press Photo Award en 2018 et a été un symbole puissant de l’instabilité politique et sociale que traverse le pays. Le plus sordide, et que les médias n’ont pas dit, c’est que l’étudiant Salazar n’a pas été victime de la violence gouvernementale. Il s’est brûlé sur 70% de son corps en incendiant une moto de la garde nationale vénézuélienne, que les manifestants avaient volé et promené – Salazar inclus – comme un trophée.

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L’image gagnante de la World Press Photo 2017, par le Vénézuélien Ronaldo Schemidt. AFP

L’afro-descendant Orlando Figuera, par contre, n’est connu qu’au Venezuela. Son histoire atroce n’a guère traversé l’Atlantique. Il avait 22 ans quand il est mort à l’hôpital Domingo Luciani à El Llanito, Caracas. Dans le même hôpital où, quelques semaines plus tard, Salazar devait passer avant d’être transféré dans la clinique privée qui lui a sauvé la vie. Figuera n’a pas pu sortir de là, « nous ne sommes pas pauvres, mais nous sommes des gens à faible revenu », déplore sa mère à la porte de sa maison, au pied des immeubles au milieu de nulle part, près de la ville de Cúa, dans Los Valles del Tuy, État de Miranda. Esparragoza ne comprend pas pourquoi l’épreuve de son fils n’a pas fait le tour du monde alors que le Venezuela était au centre de l’attention des médias. C’est peut-être parce que Figuera a été tué par la même opposition qui traite Maduro d’assassin.

 

2017: pic de violences contre le chavisme

Tout s’est passé le 20 mai 2017 sur la Plaza de Altamira – dans un quartier chic de la municipalité de Chacao, à l’est de Caracas – l’épicentre des plus violentes manifestations de droite de mémoire d’homme. Plus de 130 jours de “guarimbas” (barrages violents), des jeunes cagoulés, des barricades de rue et des cocktails Molotov… d’avril à début août. Une authentique guérilla urbaine qui s’organisa contre une crise économique qui a ruiné une bonne partie de la protection sociale. C’est aussi le moment où le chavisme a perdu sa majorité au Parlement, où il en a constitué un nouveau en convoquant une élection constituante controversée à laquelle l’opposition ne voulait même pas se présenter. L’hégémonie bolivarienne était plus que jamais remise en cause et les secteurs les plus radicaux de l’opposition ont décidé de tendre dans les rues plutôt que dans les urnes une corde qui, encore aujourd’hui – plus de deux ans et plus de cent morts plus tard – n’a pu être rompue. La répression a été brutale. Il semblait que les Vénézuéliens sortaient la pire version d’eux-mêmes alors que la polarisation sociale, alimentée d’un côté et de l’autre, atteignait un point de non-retour.

Ce jour-là, comme tout le monde, Figuera avait quitté sa maison aux petites heures du matin pour gagner sa vie en aidant à trouver des places de parking et en chargeant des sacs de courses pour les clients dans un marché à Las Mercedes, Caracas. Il était en retard et a dit à sa mère qu’il ne rentrerait pas à la maison. Il lui fallait deux heures de train depuis la capitale et il préférait passer la nuit chez son oncle dans le quartier de Petare. Mais il n’est jamais rentré. Sa mère dit qu’il est tombé sur la haine anti-chaviste. Le jeune homme portait un t-shirt couleur bordeaux et un sac à dos, se souvient-elle. A hauteur d’Altamira, Figuera a rencontré la foule violente.

« Ils l’ont poignardé, lynché, aspergé d’essence et lui ont allumé le feu. Ils l’ont brûlé vif parce qu’il était noir et parce qu’il était chaviste » raconte Esparragoza. C’est ainsi que son fils lui expliqua de sa voix quand il se trouvait à l’hôpital, au lendemain du jour où la foule d’hommes cagoulés exigeant la démocratie au Venezuela, l’interpella : « Es-tu chaviste, oui ou non ? » « Maman, quelle que soit ma réponse, ils allaient me tuer. J’ai dit oui. Je suis un chaviste, et alors. » dit le fils par la bouche de sa mère. Avant cela, le jeune homme avait déjà reçu plusieurs coups de couteau dans l’abdomen et les jambes. « D’abord quelqu’un l’a accusé d’être un voleur et plusieurs ont commencé à le frapper. Il a couru quand il a senti le premier coup de couteau dans la fesse. Puis ils l’ont poussé dans la foule et l’une des personnes présentes lui a demandé si c’était un chaviste. Ils l’ont brûlé et il a couru demander de l’aide, mais il a dit qu’il ne recevait que des insultes en retour, qu’il avait été battu avec les boucliers qu’ils portaient et se moquaient de lui. Ils lui ont dit que c’était un maudit nègre », se souvient Esparragoza.

Le jeune Orlando Figuera n’avait jamais été membre d’un parti politique. « C’était un garçon qui travaillait aussi dur qu’il le pouvait, comme j’ai fait toute ma vie pour aller de l’avant », dit clairement sa mère. « Nous sommes reconnaissants envers le chavisme. Ils ont fait beaucoup pour les gens qui en avait le moins. J’ai, par exemple, pu obtenir mon diplôme grâce à la mission d’éducation des adultes et grâce à cela, j’ai pu trouver du travail en aidant des personnes à faible revenu comme moi à faire leurs demandes de logement et autres formalités, » explique la mère d’Orlando.

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« Je demande à Dieu qu’il arrache la rage et la haine de l’âme des opposants » a déclaré la mère d’Orlando à un journal vénézuélien.

Autres crimes de haine présumés

Figuera a été le cas le plus connu au Venezuela, mais pas le seul où la haine endémique de l’extrême droite anti-chaviste a lynché des personnes passant au mauvais endroit dans le pire climat de confrontation politique et sociale de l’histoire récente de ce pays. Le Bureau du Procureur général et le Gouvernement rappellent l’existence de jusqu’à cinq meurtres semblables documentés, en plus des 23 agressions commises par des groupes d’opposition au cours desquelles les victimes ont été blessées, certaines ont également été brûlées car accusés de chavistes. L’exécutif a toujours accusé les chefs de l’opposition d’instiguer la violence et a spécifiquement légiféré contre les crimes haineux après ces épisodes, mais le cas d’Orlando n’a pas encore été résolu complètement par la Justice et sa mère n’a guère espoir que ce soit un jour le cas.

« Il y a eu des enquêtes, mais je ne pense pas qu’elles aient été suffisantes. Personne n’a été condamné pour ce qu’ils ont fait à mon fils, se lamente-t-elle. Selon le ministère public, l’affaire fait toujours l’objet d’une enquête. « Il a été possible d’identifier l’un des agresseurs, qui a fait l’objet d’un mandat d’arrêt pour les crimes d’instigation publique, d’homicide volontaire aggravé et de terrorisme, mais il est en cavale en Colombie », confirme le bureau du Procureur général à Público.

Cependant, Esparragoza vise plus haut. « Dans la guarimba qui a attaqué mon fils, il y avait plusieurs leaders de l’opposition, je crois sincèrement qu’ils sont politiquement responsables de morts comme celle d’Orlando, c’est pourquoi je n’ai pas voulu y aller quand j’ai été invité récemment à un acte d’hommage aux morts des manifestations, » affirme-t-elle en levant un doigt pour chaque nom des politiques de l’opposition qui sont passés par Altamira, le 20 mai : María Corina Machado, Julio Borges, Lilian Tintori, Miguel Pizarro.

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Depuis, Inès Esparragoza est sous traitement psychiatrique, son état dépressif l’a éloignée de l’homme avec lequel elle avait partagé 15 ans et a tenté de mettre fin à sa vie à plusieurs reprises, avoue-t-elle. Trop de lignes rouges ont déjà été franchies par tous les acteurs et elle appelle au dialogue entre le chavisme et l’opposition car, malgré tout, elle veut la paix. « Je pense que le pays a appris sa leçon après tant de morts. Je pense qu’il peut y avoir une réconciliation entre les deux Venezuela, dit-elle. Il est encore trop tôt pour savoir si ses paroles se concrétiseront, c’est pourquoi elle ne passera plus par ce beau quartier d’Altamira. « J’ai beaucoup de colère en moi et parfois de mauvaises idées me viennent à l’esprit et j’ai envie de prendre la justice en main », prévient-elle. Elle préfère rester dans son appartement, celui que le gouvernement lui a donné après avoir enterré son fils. « Orlando disait toujours qu’il allait me sortir du taudis où nous vivions, parce qu’il n’y avait pas d’eau courante et que le sol était de la terre pure », se rappelle Inès. Il ne pensait pas qu’il devait donner sa vie pour tenir sa promesse, se lamente-t-elle.

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La cité de logements sociaux dans laquelle le gouvernement du Venezuela a logé la famille d’Orlando Figuera après l’assassinat de celui-ci – JAIRO VARGAS

Jairo Vargas – 16/05/2019, pour Público (Espagne)

Source: https://www.publico.es/internacional/venezuela-mi-hijo-quemaron-vivo-chavista.html

Traduction : Venesol.org

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Des habitants protagonistes de leur histoire (Gauchebdo)

VENEZUELA • Dans le cadre de la Gran Misión Vivienda Venezuela, des milliers de familles développent un modèle communautaire et autogéré de construction de leur lieu de vie.

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Une nouvelle forme de démocratie et de gestion collective dans un quartier construit par 130 familles. (AIt)

«Nueva Comunidad Socialista Amatina». Le nom est peint sur le mur à côté d’un portrait géant du Commandante. Renny Paruta nous accueille, fier de ce quartier que les 130 familles de la communauté ont construit de leurs mains. «Amatina est le nom d’une tribu indigène qui vivait ici à l’époque précolombienne», explique-t-il. «Nous l’avons choisi au moment de la création de notre Campement des pionniers, en 2011». Nous découvrons l’histoire d’un mouvement social et politique qui nous était jusqu’alors totalement inconnu: Le mouvement des habitant-e-s du Venezuela.

Cette plateforme populaire lutte depuis le début des années 2000 – dans un pays où presque 90% de la population est urbaine – pour une ville plus juste, le droit à un logement digne et la construction du socialisme et du pouvoir populaire. Parmi les différentes organisations qui composent la plateforme, les Campements des pionniers et leurs nouvelles communautés socialistes organisent les familles sans logements dans des projets collectifs autogérés de construction de l’habitat sur la base de la propriété collective et du travail solidaire.

Entre 2002 et 2011, des avancées importantes ont lieu au Venezuela en matière de droit au logement, surtout dans le domaine juridique. «Mais c’est en 2011, avec le lancement de la Gran Misión Vivienda Venezuela qu’un énorme saut qualitatif et quantitatif se produit dans la matérialisation du droit humain à un logement digne», souligne le Mouvement des habitant-e-s dans un document de 2015 destiné au comité des droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU. C’est à cette période qu’Amatina reçoit un terrain dans la paroisse civile d’Antímano, situé dans la Municipalité Libertador de Caracas. «L’entreprise alimentaire Polar n’utilisait pas ce grand terrain laissé à l’abandon. Elle a été expropriée et le gouvernement nous l’a cédé, à nous qui n’avions pas de logement», précise Renny. C’est l’Etat qui met également à disposition tous les matériaux nécessaires comme le ciment et l’acier, mais aussi les machines de construction. Les familles se réunissent en assemblée toutes les semaines et gèrent ces ressources de manière collective.

Boulangeries populaires

descargaA l’entrée du quartier se trouve une boulangerie CLAP (Comités locaux d’approvisionnement et de production) où travaille la mère de Renny. Une centaine de ces boulangeries populaires ont été créées en 2017 pour faire face aux gros distributeurs de farine subventionnée, qui font augmenter artificiellement les prix. «Quand le blocus a commencé, c’était très difficile», nous confie-t-elle.

«On ne trouvait pas de pain tous les jours». Ici, des habitantes du quartier reçoivent la farine directement du gouvernement. Elles produisent et vendent le pain aux membres de la communauté, une proximité qui permet de garder le contrôle sur cet aliment indispensable. Dehors, dans la cour, les enfants jouent. Les travaux ne sont pas encore terminés, mais la plupart des familles a déjà pu emménager. Renny sourit: «Ici, on travaille au rythme du peuple. De plus, il est difficile de se procurer les matériaux nécessaires à cause de la guerre économique. Mais nous touchons bientôt au but.»

Nous rencontrons un groupe de femmes du quartier. Pour construire ces immeubles, elles ont appris à conduire des machines de chantier, à faire toutes sortes de travaux pénibles. On sent une grande fierté. Quand nous leur demandons quel a été leur rôle dans la prise de décisions, l’une d’entre elle rit et nous montrent les balcons. «Vous voyez? Les hommes voulaient que le balcon soit devant le salon, pour pouvoir rester sur le canapé et sortir sans trop marcher! Mais nous, qui passons beaucoup de temps à faire à manger pour la famille, on s’est battues pour qu’il y ait un balcon à la cuisine!» Résultat: les balcons s’étendent sur toute la longueur des immeubles. Ce sont cen genre de choses, concrètes, de la vie quotidienne, qui se discutent entre tous lors des assemblées. Une nouvelle forme de démocratie et de gestion collective prend forme dans ce projet innovateur. Amatina? Un quartier où les habitants deviennent les protagonistes de leur histoire.

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Journée de recensement intégral des besoins

Source : https://www.gauchebdo.ch/2019/05/16/des-habitants-protagonistes-de-leur-histoire/

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« Jusqu’à nous enterrer dans la mer »: le film intégral en ligne (sous-titres FR)

affiche_danslamer_taille-moyenne_franc.jpgComment le petit peuple, les gens modestes, et les femmes en particulier des quartiers populaires vénézuéliens (que les grands médias s’évertuent à invisibiliser) vivent-ils la guerre économique décrétée par les Etats-Unis, organisent-ils la résistance et renforcent la démocratie à la base… ? De cela, l’information calibrée ne parle jamais. Ce film surgit d’un an de vie commune du réalisateur Thierry Deronne avec les habitants du barrio Bello Monte, dans l’état d’Aragua et fait le point sur la révolution bolivarienne en essayant de faire « politiquement du cinéma plutôt que du cinéma politique ». Pour le professeur de cinéma documentaire Thierry Odeyn (INSAS, Bruxelles) ce film nous apporte « une trace de la construction d’une démocratie au Venezuela » et pour l’ex-rédacteur en chef du Monde Diplomatique et spécialiste de ce continent qu’est le journaliste français Maurice Lemoine, «c’est le film le plus juste que j’ai vu sur l’Amérique Latine».

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Histoire du travail effectué par un village de communard(e)s pour faire avancer la Révolution Bolivarienne

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Notre Commune El Maizal est constituée de 22 Conseils Communaux dont 12 font partie de la Municipalité Simon Planas de l’Etat de Lara et 10 de celle d’Araure, dans l’état de Portuguesa. Nous sommes une des premières communes à avoir regroupé des terres de différents états. Depuis notre création nous gérons une exploitation de 2200 hectares dont environ 1800 sont essentiellement destinés à la culture du maïs. C’est Chavez en personne qui nous a remis ces terres le 5 mars 2009. Il nous a visités deux fois – le 29 novembre de la même année, c’est depuis El Maizal qu’il a transmis le n°344 d’Alo Presidente”.

Cette année-là, nous avions réalisé notre première plantation communale d’environ 150 hectares de haricots à l’aide d’un crédit géré par la Banque Mutuelle Gustavo Vegas Léon. En 2010, nous sommes passés au maïs avec un financement géré par le Conseil Communal El Esfuerzo de la communauté d’El Cerrito, car à cette époque-là nous n’étions pas encore officiellement enregistrés. Ce n’est que récemment, en octobre 2012, que le Ministère des Communes a procédé aux premiers registres légaux, celui de la Commune El Maizal a été signé le 25 mars 2013.

En 2011 et 2012, nous avons semé 250 hectares de maïs et en 2013 nous en avons planté 600, cette année-là ayant été une année cruciale pour la Commune qui, après de multiples conflits avec la Corporation Venezuela de Alimentacion, entreprise d’Etat avec laquelle nous partagions l’utilisation des sols, décida de s’en retirer lors d’une Assemblée. Cette superficie cultivée est restée constante jusqu’en 2015.

En 2016 et 2017, 1100 hectares de maïs ont été cultivés avec la participation de 68 petits producteurs; le financement attribué par le gouvernement révolutionnaire ne correspond qu’à une superficie de 600 hectares mais le reste a pu être cultivé grâce aux excédents provenant de la Commune. C’est ainsi que s’est constitué le Réseau de Producteurs qui s’étend et se renforce actuellement avec l’ajout d’autres cultures.

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.. mais la Commune El Maizal, ce n’est pas que du maïs !

En travaillant incessamment, nous avons pu mettre en place diverses expériences de production parallèlement avec notre développement organisationnel, grâce à notre détermination à aller de l’avant et au soutien du gouvernement révolutionnaire.

Cela nous a permis de contribuer de manière significative au bien-être de notre population, d’abord dans le cadre de la Commune El Maizal et maintenant au-delà, ce qui a amené la Municipalité Simon Planas à créer sa cité communale et son district de développement agro-industriel. Pas à pas, nous avons monté d’autres entreprises de propriété sociale directe et des unités de production qui forment aujourd’hui notre système d’économie communale. En 2011, nous avons lancé un projet d’élevage en achetant 48 taureaux destinés à l’engraissement grâce à un crédit du FONDEMI. Lors de l’Assemblée de juillet 2011, qui s’est tenue sur le terrain de foot de Sabana Alta, nous avons choisi le statut de l’entreprise, première étape dans ce nouveau défi. Puis nous avons agrandi le troupeau en y ajoutant quelques vaches, ce qui nous a permis de fabriquer nos premiers fromages. Cette nouvelle expérience nous a encouragé à demander un autre crédit auprès de FONDAS pour l’acquisition de bétail laitier en 2013, commençant par 60 vaches et 3 taureaux. L’année suivante, nous avons rajouté 50 vaches et 2 taureaux à ce troupeau. Dès 2012, nous nous sommes lancés dans la vente de viande et en 2013, dans celle de fromage aux Conseils Communaux de notre secteur. Fin 2017, nous disposions d’un cheptel de 1150 têtes. Nous avons amélioré chaque jour notre travail de sorte que nous avons pu maintenir puis augmenter la production de fromage, de beurre et de viande qui, ajoutée à celle du maïs, nous a permis d’organiser des journées de vente en plein air avec les conseils communaux.

Le Centre de stockage et de distribution de la Commune El Maizal

Dès 2013, quand la commune d’El Maizal a commencé son activité de vente aux conseils communaux, deux nouveaux défis se sont posés à nous : créer les conditions nécessaires au stockage de notre production et de celle des petits producteurs de la région (contribuant ainsi à lutter contre les intermédiaires et la spéculation), et élargir peu à peu le circuit des communautés desservies au-delà de notre territoire.

C’est ainsi qu’en 2014, la vente extérieure à notre secteur s’est étendue aux 86 Conseils Communaux de Sarare et La Miel. En 2016 s’acheva la construction de notre Centre de stockage et de distribution, répondant ainsi au besoin de disposer d’un espace où stocker la totalité de nos produits, dont le fromage, la viande, les haricots, le maïs, le beurre, les légumes, entre autres. Rien qu’en décembre 2017, près de 8 000 kilos de viande ont été écoulés, approvisionnant tout le secteur de la Commune El Maizal ainsi que les deux paroisses de la Municipalité, Sarare et La Miel. A la même époque, nous avons écoulé 1 500 kg de fromage, 800 kg de beurre, près de 4 tonnes de légumes dont des poivrons, de la coriandre, des oignons, sans compter la vente de près de 2 500 kg de café moulu.

Nous avons participé à bon nombre d’autres actions de vente en dehors de la Municipalité, couvrant des communes ou des organisations sociales, institutions et associations diverses ; nous étions par exemple présents pendant trois années consécutives sur les Marchés Communaux organisés par le Ministère des Commune à Caracas.

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La transformation du maïs : meule et minoterie

En 2017, nous avons tenté de réaliser un vieux rêve : transformer nous-mêmes le maïs que nous produisons, alors qu’il finit habituellement entre les mains de l’industrie agro-alimentaire, remis par ce même gouvernement auquel nous fournissons toute notre production subventionnée. Un système fermé qui renforçait notre dépendance et détournait une part importante du produit de notre travail de notre zone d’activité et de notre Municipalité. Après diverses tentatives et projets, nous avons fini par intégrer le Programme de Minoteries lancé par le Ministère des Communes et nous disposons déjà des infrastructures nécessaires pour en accueillir une qui devrait être opérationnelle sous peu et sera alimentée par la production de notre Plan de Semis. En parallèle, nous avons récemment installé un moulin, en sorte de disposer des deux options pour répondre aux besoins de la population ; elle aura une capacité de production journalière d’environ 2 000 kg de maïs.

L’Entreprise de Propriété Sociale Directe et Communale (EPSDC) de Briques Simon Bolivar

La EPSDC de briques Simon Bolivar, créée en 2010, a été cruciale pour la réalisation de nombreux projets par la Commune El Maizal, en termes de construction d’infrastructures sociales et productives. C’est de là que proviennent les briques utilisées dans la construction des maisons de la Grande Mission Logements Venezuela, des lycées et des écoles que nous avons bâties, des maisons communales et des entrepôts, y compris les intrants permettant d’améliorer le rendement des récoltes. Une bonne partie de l’amélioration de notre habitat est due au travail de ses ouvriers. Cette même usine a pu maintenir une production de 400 000 briques par an jusqu’à ce que survienne la crise du ciment en 2016. Actuellement, elle est à l’arrêt à cause du coût élevé des matériaux et de son emplacement difficile d’accès.

L’Entreprise de Propriété Collective Directe Communale de Distribution de Gaz Camilo Cienfuegos

L’entreprise de distribution de gaz Camilo Cienfuego a été inaugurée en 2012 après la présentation de son projet à PDVSA Gaz et un conflit avec la Mairie de Simon Planas au sujet de son contrôle (qui perdure dans une certaine mesure). L’usine alimente 190 Conseils Communaux, et près de 16 000 familles avec la vente de 25 000 bonbonnes par mois. Elle est dirigée par une équipe de producteurs qui vivent dans les différentes communautés du territoire de la Commune. Elle est toujours en fonctionnement à ce jour malgré un contexte de crise, avec des baisses ponctuelles dans les cas où une expédition au secteur approvisionné est nécessaire et où des difficultés surviennent lors de l’entretien des camions. Elle est actuellement en pourparlers avec les conseils comunaux pour chiffrer de manière transparente ses coûts de production et rechercher des solutions qui ne représentent pas une charge supplémentaire pour les communautés.

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L’Unité de production communale de cultures

A Sabana Alta, qui fait partie du secteur de la Commune El Maizal, fonctionne une UPC de cultures protégées, un complexe agricole de 6,6 hectares constitué de 12 unités destinées à l’ensemencement d’une surface de 540 m2 chacune, un réservoir australien de 300 000 litres, des systèmes d’irrigation, un bureau, des appartements, des salles de bain, une serre pour la germination et pour les jeunes plants, une salle de fertilisation et un local pour les pompes, le tout recouvrant une superficie de plus de 160 m2. Elle a été construite par la Corporation Vénézuélienne d’Agriculture et administrée par FONDAS pendant 8 ans, celle-ci l’ayant laissée complètement à l’abandon suite à une mauvaise gestion. Puis elle a été dévalisée jusqu’à sa récupération par la Commune.

En 2014, la Commune El Maizal l’a reprise en main et depuis lors nous la restaurons petit à petit à nos propres frais, après avoir relancé sa production dès le début, avec diverses cultures comme les poivrons, les tomates, les oignons, les concombres, la coriandre, le pois quinconcho, le manioc (yuca)…

Lors de la session du Conseil Présidentiel du Gouvernement Populaire des Communes du 15 août 2015, le Président Maduro a signé son transfert à la Commune El Maizal, scellant ainsi notre victoire dans ce combat. A ce jour, six unités récoltent les poivrons tandis que les six autres sont en pleine reprise et viendront s’ajouter à sa capacité de production. Jusqu’en avril 2018, nous avons obtenu une récolte d’environ 3000 kg alors que cette plantation n’en est encore qu’à 50% de son exploitation. L’objectif de production annuel est d’environ 30 tonnes de légumes.

La plantation de semences de maïs et de riz sera aussi développée dans le cadre des projets-clés visant à renforcer l’autonomie dont a besoin notre production agricole. Parmi les réparations effectuées, la pose de la toiture de six pépinières et la remise en état d’un système d’irrigation qui avait été détérioré autant par l’usure que pendant le cambriolage, surtout au niveau de ses tuyaux, tubes et valves, ont exigé un gros investissement.

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L’Unité de Production Communale Argimiro Gabaldon (anciennement Porcinos de Alba)

L’Unité de Production Communale Argimiro Gabaldon, anciennement nommée Porcinos del Alba et aux mains de la Corporation Vénézuélienne d’Agriculture, a été récupérée par ses travailleurs et les habitant(e)s de la Commune El Maizal le 28 juin 2017. Elle a été occupée parce que ladite entreprise n’assumait pas comme il le fallait l’entretien de l’unité de production, provoquant la perte de bétail et portant préjudice aux travailleurs, probablement pour la céder ensuite au secteur privé. Alors qu’elle dispose d’une capacité d’accueil de 6000 têtes de bétail, elle a été récupérée avec 350 animaux faméliques, des reproductrices pour la plupart. Les travailleurs, préoccupés par leur état, leur avait donné des mangues jusqu’à ce qu’au bout de 28 jours de privation de nourriture, ils aient fini par l’occuper avec l’aide de la Commune El Maizal.

En décembre 2017, après cinq mois de travail sous le contrôle de la commune et des travailleur(se)s, le troupeau avait déjà regagné 2 150 bêtes, dont 900 en croissance et 665 pour l’engraissement, sans compter les reproductrices et les veaux à la mamelle. La plus grosse difficulté que cette unité productrice de base a rencontrée a été d’obtenir de l’alimentation pour bétail à un prix juste qui dans les dispositifs actuels, dépend d’un quota chez des distributeurs d’aliments contrôlés par l’Etat. Curieusement, elle n’a pas pu y accéder jusqu’à présent, ce qui l’a obligée à recourir à l’achat par intermédiaires à des prix spéculatifs au cours des premiers mois.

La mortalité du bétail a chuté de 98%, les animaux sont suivis par des vétérinaires et un accord a été conclu avec Porcinos de Alba pour régulariser la fourniture d’aliments en échange de l’achat assuré par l’Etat de la majorité de la production. Mettre en route sa propre usine de production d’aliments équilibrés dans l’U.P.C. constitue une priorité pour la Commune El Maizal. C’est ce qui lui permettra d’améliorer les conditions de sa production et, par ailleurs, de récupérer la flotte de véhicules adaptés aux exigences du transport des porcins, actuellement à l’abandon.

S’y ajoutent : la remise en état des silos de chaque aire de travail (10 d’une capacité de 14 000 kg, dont 8 nécessitent une maintenance et 2 des réparations importantes, y compris un petit silo de 2 000 kg), l’installation d’une unité de production d’électricité assurant l’autonomie de l’U.P.C., et pour finir l’installation d’un système d’éclairage pour garantir sa sécurité en améliorant sa surveillance.

L’Unité de Production Communale Simon Bolivar (anciennement UCLA)

Le 17 octobre 2017, nous nous sommes engagés dans une nouvelle bataille. En effet, les installations de la station expérimentale de l’Université du Centre-Ouest Lisandro Alvarado, dans le secteur El Torrellero, étaient à l’abandon bien qu’ayant bénéficié d’un financement de l’Etat ; elle avait une longue expérience de la pisciculture derrière elle, grâce aux infrastructures qui s’y trouvaient et dont elle avait besoin pour son activité.

Nous avons été convoqués par le Conseil Communal de la Collectivité de Torrellero qui nous a proposé de nous charger de sa relance et d’assurer sa gestion avec celle-ci. Cette position avait été prise en Assemblée suite à l’indignation soulevée par les vols permanents et les dégâts importants causés à cette infrastructure destinée à la production et à la formation, et qu’il fallait maintenant remettre en état pour qu’elle retrouve son emploi. Ceci en hommage à la méthodologie du “point et du cercle” dont parlait Chavez.

L’UCLA réagit à cette récupération en mentant à l’opinion publique, affirmant que l’unité était pleinement opérationnelle et que ses installations étaient menacées. Elle porta plainte en Justice bien que l’évidence même prouvait tout le contraire. Nous sommes donc engagés dans un procès judiciaire dont nous sortirons certainement gagnants. Nous y avons trouvé du bétail de race Caroro dans de très mauvaises conditions, une maison considérée comme patrimoine régional tombait en ruines, les médicaments vétérinaires étaient périmés, les machines pillées et les étables s’écroulaient à cause des infiltrations d’eau, les caves et les pièces d’habitation étaient en mauvais état ou totalement endommagées. Bref, nous étions face au résultat de nombreuses années d’abandon.

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En mars 2018, la Commune El Maizal, avec l’accord de la communauté, décida d’installer là son troupeau laitier, car l’espace et les conditions qui s’y présentaient après l’aménagement des lieux permettait de mieux s’en occuper. Cette décision a été prise suite à l’incendie criminel de plus de 200 hectares de pâturages situés sur les terres de El Maizal, qui a mis notre cheptel en danger.

En avril 2018, nous avons obtenu une production journalière de 180 litres de lait et de 15 à 18 kg de fromage. Notre cheptel, qui se trouvait alors à l’UPC Simon Bolivar, comptait 46 vaches Girolando et 36 Carora, 25 veaux Girolando et 14 Carora répartis dans 14 parcs installés sur les 90 hectares dont les pâturages et les clôtures ont été récupérés. En ce qui concerne les infrastructures destinées à l’élevage, nous disposons de 4 corrals, une salle de traite mécanisée avec 4 stations dont 2 sont en activité et le reste en cours de restauration. Il y a également 8 chambres froides dont 2 fonctionnent, 3 entrepôts utilisables et un logement actuellement occupé par les producteurs qui vivent sur place.

Nous essayons de relancer le projet de pisciculture, vu qu’il existe six étangs sur le site (le premier en voie de réfection pour l’élevage de tilapias); la remise en état d’une salle d’alevinage, base de l’autonomie que requiert le bon déroulement de cette expérimentation, est également envisagée. Dans le cadre du démarrage du Plan de Semis 2018, nous avons déjà préparé 3 hectares pour la plantation de maïs, 4 pour le Verger Communal en collaboration avec la communauté, et ½ hectare pour les producteurs qui vivent à l’UPC.

Le Verger Communal est une nouvelle ligne de travail du Plan de Semis 2018, qui consiste à former des Brigades de plantation, que ce soit avec des équipes de producteurs provenant des différentes UPC et/ou des comuneras et comuneros qui développent le processus organisationnel du Mouvement Communal Simon Planas. La Commune El Maizal y conserve les intrants de base pour la culture de de produits essentiels comme le maïs, le quinconcho, les haricots et la yuca, entre autres. La majorité de la production est destinée à la consommation familiale des brigadistes, et le restant à l’approvisionnement à des prix équitables des secteurs où ceux-ci mènent leur travail politique et social. Ces ressources permettant de reconstituer le stock d’intrants et de créer un fonds pour la plantation suivante.

L’UPC Simon Bolivar a aussi un fort potentiel de développement du tourisme communal, car sa région est constituée de formations rocheuses offrant aux visiteurs nationaux comme étrangers l’occasion de pratiquer des sports extrêmes et d’effectuer des randonnées dans un milieu naturel riche en cascades, en faune et en flore. Cette unité est cruciale pour l’effet de levier qu’elle exerce sur les processus fondamentaux assurant la viabilité de la Commune et du Mouvement Communal Simon Planas, du fait qu’elle réunit toutes les conditions pour l’installation de plusieurs unités de conditionnement ; à part celle du fromage et du beurre qui fonctionne déjà, il pourrait s’en ajouter une produisant de la charcuterie et de la viande sous diverses présentations et découpes, ainsi qu’ un abattoir pour les bovins et les porcins, par exemple. Pour cela, il nous faut remettre en état les chambres froides et évaluer l’état des infrastructures physiques afin d’établir un plan de restauration ou de remplacement, tant de la maison que des entrepôts, y compris l’achèvement de l’aménagement des parcs et la réfection des clôtures extérieures, travail qui a déjà été commencé.

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Un travail de gestion et de production communales réinvesti dans le social

Notre Commune El Maizal a subvenu aux besoins sociaux des communautés grâce aux revenus de projets financés par l’Etat et aux excédents générés par nos entreprises et unités de production. Ceux-ci ont été nombreux au cours des dernières années, ce qui constitue une nouvelle preuve de l’importance du partage des responsabilités tel qu’il figure dans la Constitution Bolivarienne et dans les programmes de nos conseils communaux ; ce sont les deux axes majeurs de notre Révolution.

Nous pouvons affirmer avec fierté que c’est grâce à la mobilisation de la population et à sa gestion directe qu’ont pu être réalisés l’asphaltage des routes, effectué par les communes de Paujisal, Palmarito, El Flaco, Caballito et Palma Redonda, l’électrification de commune comme Paujisal, Palma Redonda, El Playon, La Calanchera, Brisas Del Cerrito, Palma Sola, Palmarto. Sans oublier la construction de l’aqueduc de El Calvario.

Nous avons aussi construit deux dispensaires, l’un à Caballito qui est sur le point de fonctionner, l’autre à Palmarito, que nous avons aussi équipé et qui est déjà en activité. S’y ajoutent plus de 1200 mesures d’aides en matière de santé, que ce soit pour des opérations, l’achat de médicament ou d’équipements médicaux. Sans compter divers dons apportés à des écoles, des lycées et à diverses activités sociales et culturelle, de même qu’à des églises catholiques et évangéliques, fournissant par exemple des kits sportifs à des disciplines comme le base-ball, le football, le volley ball et des uniformes pour les équipes, et enfin la construction du stade de El Cerrito.

Nous avons remis en état cinq écoles rurales et construits avec nos excédents trois lycées pour 450 élèves environ à El Cerrito, Caballito et Sabana Alta où a également été édifiée par nos soins la Maison Communale. Notre travail a aussi permis la construction de 284 logements distribués sur tout le territoire de la Commune, dans le cadre de la Grande Mission Logement. Nous projetons d’édifier une infrastructure qui servira de siège au groupe universitaire de L’Université Polytechnique Territoriale J.J. Montilla de l’Etat de Portuguesa, avec laquelle nous avons passé un accord en vue de construire des annexes qui accueilleront au minimum 300 de nos jeunes dans le cadre de trois Programmes Nationaux de Formation (P.N.F.) dans les spécialités de soins vétérinaires, agro-alimentation et conditionnement-distribution d’aliments.

Nous oeuvrons à un regroupement politique autour d’un projet de Cité Communale

Tout comme nous avons développé la Commune El Maizal, nous avons mis en route le Mouvement Communal Simon Planas, avec la collaboration des différentes communes de la Municipalité, relevant le défi d’aller encore plus loin dans l’édification de l’Etat Communal, projet stratégique de notre Commandant Chavez qui a devant lui une route toute tracée dans les Lois du Pouvoir Populaire; pour nous, il s’agit de la seule stratégie qui nous permette d’affronter la phase actuelle d’escalade de l’agression impériale en sortant des limites de l’Etat bourgeois et de ses méthodes de gestion politiques comme la corruption, la bureaucratie et le clientélisme ; méthodes qui ont depuis toujours favorisé la dépendance et le colonialisme du capitalisme rentier vénézuélien.

C’est pour cette raison que nous avons créé nos Conseils Communaux constitués de Communes, dont celle de El Maizal est la pionnière. Et nous continuons à nous regrouper politiquement pour consolider notre autogouvernement. Nous avancerons dans cette voie avec un nouveau pas en avant consistant à organiser nos Villes Communales pour ensuite développer la Fédération Communale avec son District Moteur de Développement Agroindustriel, pièce maîtresse de notre stratégie visant à devenir un modèle de construction du socialisme.

L’évaluation de notre territoire et des communes créées nous mène à la conclusion qu’il nous faut créer deux Cités Communales, bases de notre future Fédération Communale, ce qui veut dire que les communes faisant actuellement partie des paroisses Sarare et Gustavo Vegas Léon de Simon Planas constitueront une Cité Communale, parmi elles : El Maizal (sachant qu’elle est aussi composée de conseils communaux de l’Etat de Portuguesa), Lanceros de Atures, Sarare (où nous avons relevé le défi de développer une véritable dynamique communale et de faire en sorte qu’elle redevienne ce qu’elle aurait toujours dû être), Armando Bonilla (projet de cette commune suite à l’élargissement du territoire de la Commune de Sarare) et Ezequiel Zamora.

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La deuxième Cité Communale sera constituée des Communes de la Paroisse Buria (certaines comprenant des Conseils Communaux de l’Etat de Yaracuy), terre de Negro Miguel et de son épopée libertaire, dont Negro Miguel, Minas de Buria, Revolucionarios de Buria Con el Cuartel de la Montana, et Rio Turbio de Buria Patria Querida. Ce sont donc 9 Communes qui feront partie des deux Cités Communales devant former la Fédération Communale, en hommage à notre Commandant Chavez et à notre Général d’hommes et de femmes libres, Ezequiel Zamora : nous consoliderons ainsi notre Système de Gouvernement Populaire.

Ce processus met l’accent sur le rôle des femmes, des jeunes et de la production. Voilà pourquoi s’est développé le Mouvement des Femmes Communardes, créant ses propres méthodes et objectifs à partir de son programme, car la grande majorité de nos membres sont des femmes, ce qui fait notre force et caractérise nos actions tout en garantissant la qualité de sa ce que nous entreprenons ainsi que nos victoires. Il nous faut aussi renforcer le Mouvement des Jeunes Communeros, qui représente un autre succès important de notre lutte, à savoir le ralliement d’une importante partie de la jeunesse qui assume les tâches les plus variées et s’exprime par sa propre voix dans toutes nos actions.

Nous nous engageons aussi à développer intégralement la production communale avec son réseau de producteurs, dans la perspective d’améliorer notre Programme de plantations comunal qui vise à rendre plus efficace encore le travail effectué sur nos terres. La distribution et le conditionnement de notre production doivent être effectués de nos propres mains. Associer nos femmes et nos jeunes à la capacité organisatrice de nos Conseils Communaux et de nos Communes et à notre production, voilà la formule organisationnelle proposée durant toutes ces années et qui doit s’imposer plus que jamais en cette période extrêmement difficile que connait la révolution bolivarienne.

Source : http://www.albatv.org/Comuna-El-Maizal-en-el-camino-de.html

Traduction : Frédérique Buhl

Photos: Juan José Moreno pour Terra TV et Alba Ciudad

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En direct du Venezuela: La mayonnaise Guaido ne prend pas

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Caracas. 7 heures du matin. Le soleil se pose sur les montagnes de l’Avila entourant la ville, qui commence à fourmiller. Des files de personnes descendent la colline où se perche le barrio El Manicomio pour rejoindre l’avenue Sucre, l’artère principale qui se faufile entre les quartiers populaires de l’Ouest de la Capitale. Des dizaines d’enfants en uniforme scolaire, certains cavalant d’autres aux mains de leurs mamans prennent le chemin de l’école. Je pense à ma fille qui elle, en raison d’un conflit social en France, restera à la maison.

A quelques encablures de là, des militaires en armes boivent un café au check point qui mène à Miraflores, le Palais Présidentiel. L’image de Caracas respirant la normalité contraste brutalement avec celle que l’on peut avoir d’un pays menacé d’intervention militaire par l’administration Trump.

Une vie quotidienne à mille lieux des annonces de la « révolution vénézuélienne » qui commence à s’imposer dans nos médias.Obs

Juan Guaido, nouveau Frankenstein politique crée par la Maison Blanche, est un produit médiatique qui se vend surtout à l’extérieur du pays. Un peu comme nos mauvais vins, ou les médicaments anti-paludisme produits par Sanofi. Ça n’a aucun intérêt pour la population locale. La majorité des vénézuéliens ne semblent pas vouloir consommer ce produit. Croisé par hasard, Alejandro, un jeune boxeur vénézuélien opposant à la Révolution Bolivarienne me confiera : « J’aime pas Maduro, il est nul, mais vraiment nul. Mais aujourd’hui, on a le choix entre ça et retourner à l’esclavage. Il n’y a pas de sortie ». Alejandro résume assez bien le point de vue d’une partie de l’opposition. Malgré l’intransigeance de Guaido, la guerre civile n’est pas une option.

La mayonnaise putschiste ne prend pas au pays. Peu importe, elle est un rouage essentiel dans la story-telling occidentale pour justifier un renversement de régime. Un cynisme absolu, imposé par les États-Unis, et récemment validé par le président Macron.

Plus occupé à résoudre un quotidien affecté par un infâme blocus économique, les habitants de la Capitale ne semblent guère prêter attention aux gesticulations des députés de l’opposition, réunis ce mardi 5 février en session plénière. Sur la place Bolivar, situés à cent mètres, un spectacle de break dance capte l’attention de plusieurs centaines de personnes.

Le Capitole est un symbole de la confrontation des pouvoirs et des tensions de la vie politique vénézuélienne. Passé l’entrée principale, les députés à l’Assemblée Nationale rejoignent l’hémicycle, situé sur leur gauche. Les députés à l’Assemblée Nationale Constituante eux prennent la direction opposée, vers le salón Elíptico, siège de l’ancien sénat. Les deux salles se font face, comme pour ancrer symboliquement le conflit de pouvoirs et de légitimité. Les députés des deux assemblées se croisent à l’entrée, ne se saluent pas, se défient. « C’est assez symbolique en effet, nous dit Tania Diaz, vice-présidente de l’Assemblée Constituante. La seule chose qui ne l’est pas, c’est que, passé l’entrée, nous devons aller à droite, et eux à gauche », ajoute-t-elle en riant.

Une situation certes inédite, dans l’histoire de cette République, mais qui balaie les accusations d’État failli, de « dictature totalitaire », ainsi que tous les éléments de langage mis en place par Washington et repris à l’unisson par le système médiatique.

Ce mardi, l’opposition a retouché et voté sa loi sur la Transition pour tenter de masquer sous un vernis officiel la construction de leur para-Etat. Étrangement, aucune personnalité politique ni aucun média ne relève que cette « loi sur la Transition » autorise l’Assemblée Nationale à s’arroger illégalement tous les pouvoirs de la République Bolivarienne du Venezuela. Comment appelleriez vous ca ? Un coup d’Etat ? Dans la novlangue trumpienne, désormais parlée dans l’Union européenne, on considère ça comme « une transition démocratique ». Et qu’importe le Peuple.

Le pouvoir de Guaido va donc nommer un Pouvoir électoral parallèle dans le but d’organiser un simulacre d’élection. Ce scénario aurait plus de succès sur Netflix, mais là encore il est nécessaire pour imposer leur légitimité dans l’opinion publique internationale. Soit les politiciens d’opposition réalisent une élection sans aucun contrôle, et médiatiquement ils pourront légitimer un pouvoir fantoche dans l’opinion publique internationale, soit ils poussent Nicolas Maduro à interdire un scrutin illégal et truqué d’avance, et l’image du président sera dégradée à l’étranger. Pile ou face, tu gagnes.

Notons au passage, que le « chavisme critique » soutient cette tentative de coup d’Etat institutionnel. Ce mouvement politique est un regroupement d’universitaires dont les voix sont abondamment relayées par leurs pairs européens malgré leur manque absolu de responsabilités politiques et de légitimité démocratique. Lorsqu’ils décident de soutenir électoralement un candidat, celui-ci peine à arriver à 0,5% des voix.

Le 5 février, les représentants les plus éminents de l’extrême gauche intellectuelle vénézuélienne ont rencontré Guaido pour ne pas être exclus de la partie si jamais le coup d’Etat réussissait. Cette réunion met un terme définitif à la fable d’un « chavisme critique », censé représenter un courant politique indépendant. Imagine-t-on un « gaullisme critique » négocier avec Pétain leur participation au régime de Vichy ? Cette « troisième voie » imaginaire tant promue hors du pays (encore une fois) a désormais choisi son coté de la tranchée. Le slogan « Ni Maduro Ni Guaido », scandés par leurs réseaux internationaux vient de voler en éclats. Il serait donc judicieux que les soutiens étrangers de ce courant de l’opposition adoptent la position de leurs mentors vénézuéliens et s’alignent ouvertement sur les positions de Trump, de Bolsonaro, d’Uribe, de Macron.

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Edgardo Lander, Gonzalo Gomez, Santiago Arconada, Nicmer Evans, OIy Millan, Hector Navarro se réunissent avec Guaido

Comme la marque Guaido n’arrive pas à s’imposer dans le marché politique vénézuélien, l’opposition prépare une nouvelle action destinée à ternir l’image du président Maduro au niveau international. La demande d’aide humanitaire est un leurre. Les 20 millions de dollars promis par Trump pour résoudre les problèmes des vénézuéliens est une faible aumône. Cette somme représente l’équivalent de 800.000 caisses de nourritures CLAP. En comparaison, le gouvernement bolivarien en achète 6 millions par mois. Et ces miettes ne sont rien en comparaison des 23 milliards de dollars de pertes économiques dues aux sanctions financières et au blocus.

Encore une fois, il s’agit d’une opération politique visant à décrédibiliser Nicolas Maduro au niveau international. Soit le président autorise le passage de convois et assume la violation de la souveraineté territoriale depuis la Colombie, soit il refuse et les médias ne manquerons pas de dénoncer l’infâme Maduro, affamant son peuple. Répétons le encore une fois : les pays qui feignent de se préoccuper du sort des vénézuéliens ferait bien de lever le blocus qui les martyrise.

Face à ce scénario, la grande inconnue reste la patience de l’Oncle Sam. Quelle sera la prochaine étape lorsque ils admettront que le médiatique Guaido ne parviendra pas à s’imposer sur la scène nationale ?

Romain Migus

Source de cet article: https://www.romainmigus.info/2019/02/en-direct-du-venezuela-la-mayonnaise.html

« Il est aussi nécessaire de défendre la construction du modèle du peuple vénézuélien que de lutter contre le réchauffement climatique », entretien avec Alessandra Moonens, médecin et militante féministe

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En Belgique, le Réseau de Solidarité avec la Révolution Bolivarienne (@redeuropave) a rencontré Alessandra Moonens (photo), médecin de famille, membre de Venesol et du Réseau européen de solidarité avec la révolution bolivarienne. Elle a vécu au Venezuela pendant 8 ans, de 2007 à 2015, participant en tant que militante à la construction politique de divers mouvements de femmes dont Plataforma para el Derecho al Aborto, Araña Feminista, Feministas en Acción Libre y Directa por la Autonomía Sexual y Reproductiva (Faldas-R), Escuela de Feminismo Popular.

Elle a également travaillé avec des mouvements de base tels que le Courant Révolutionnaire Bolivar y Zamora (CRBZ), le Front National Paysan Ezequiel Zamora (FNCEZ), le Mouvement des Habitants (mouvement anti-spéculation immobilière et pour le droit au logement) et l’Alianza Sexo-Género Diversa Revolucionaria (ASGDRe) – l’Alliance Révolutionnaire des Différences de Sexe et de Genre. En tant que professionnelle de la médecine, elle a travaillé dans plusieurs centres de santé ruraux et dans l’un des centres de soins intégraux pour femmes. Aujourd’hui, elle nous parle de son expérience au Venezuela et de la façon dont le processus bolivarien est perçu en Europe.

Par rapport à ton expérience de vie au Venezuela, avec les mouvements de base féministes, les mouvements paysans et en tant que médecin en milieu rural, que retiendrais-tu du processus bolivarien ?

Eh bien, soulignons d’abord qu’il s’agit d’un processus, c’est-à-dire d’un ensemble d’initiatives, de nouvelles structures, de façons d’organiser, d’expériences qui vont toutes de pair. Nous essayons de révolutionner tous les espaces et tous doivent avancer en même temps, car tous sont imbriqués, nous ne pouvons révolutionner la santé sans toucher à l’éducation, au transport, etc. Mais si je devais insister sur un de ces aspects… je pense que j’insisterais sur la territorialisation de l’éducation, c’est-à-dire sur l’arrivée de missions éducatives dans tous les coins du pays. C’est ce qui a permis au Venezuela d’être déclaré Territoire Libre d’Analphabétisme par l’Unesco en quelques années, et avec cela, des espaces de formation ont été développés au niveau universitaire dans des villes où la majorité des gens ne pouvaient même pas rêver d’aller à l’université, des carrières ont été ouvertes comme ingénieur agroalimentaire, médecine, droit, génie dans la construction civile, entre autres. Il convient de noter que le taux de scolarisation universitaire au Venezuela est le cinquième plus élevé au monde et le deuxième en Amérique latine.

Maintenant, en tant que médecin, je ne peux m’empêcher de citer les Missions de Santé telles que « Barrio Adentro », qui ont permis aux médecins, aux infirmières, aux dentistes et aux programmes de prévention d’atteindre directement le village, où qu’il soit, au lieu que les malades aient à se rendre en ville pour trouver des médecins – ce qui était une forme de mépris par ailleurs, comme une claire démonstration de différence de classe – qui les traitent directement dans leurs communautés ou quartiers. Néanmoins, je dois également dire que les femmes sont un peu oubliées dans ces Missions lorsqu’il s’agit de développer la planification familiale, la grossesse et l’accouchement car la pierre angulaire de l’émancipation des femmes est le droit de décider de leur corps et non de mourir dans tout ce qui a trait à la grossesse, l’accouchement ou l’avortement… et on ne s’en est pas préoccupé dans ces Missions.

C’est une dette historique que le processus révolutionnaire garde envers les femmes et que, de nos jours, le mouvement féministe au sein du processus bolivarien exige avec plus de force chaque jour. Mais nous, les femmes, nous ne nous attendons jamais à ce qu’on nous donne le droit de nous organiser et au Venezuela, les femmes ont commencé à s’organiser pour défendre leurs droits, avec une clarté politique révolutionnaire qui m’a fait comprendre que, même si je me sens féministe, je me sens avant tout appartenir à ce féminisme socialiste, révolutionnaire et Bolivarien. En d’autres termes, sortir du rôle que la société patriarcale leur impose pour révolutionner leur propre vie, tout en construisant la Révolution bolivarienne dont elles sont l’axe fondateur puisqu’elles représentent la majorité des bases de la force bolivarienne. Les femmes ont utilisé les politiques sociales pour transformer leur réalité et celle du processus sans que cela ait été pensé à cette fin. Il est indispensable de parler de l’espace le plus révolutionnaire qui s’est développé durant toutes ces années de processus : les communes et les villes communales, urbaines et rurales. Ce sont les laboratoires de la société du futur. Les expériences qui s’y construisent sont essentielles pour ceux d’entre nous qui cherchons à nous organiser dans une société post-capitaliste, juste, profondément et véritablement démocratique, participative, protagoniste et bien sûr, anti-patriarcale.

13508859_10154270692393615_569623303900787297_nÀ présent que tu es en Belgique, comment perçois-tu la réalité de ce qui se passe au Venezuela ?

Cela dépend évidemment des sources d’information. Ayant vécu au Venezuela pendant tant d’années, je continue d’entretenir des liens étroits avec mes camarades et je peux recevoir des informations directes de personnes de confiance, en plus des médias alternatifs que je lis. Maintenant, en écoutant dans les médias hégémoniques les nouvelles quotidiennes sur le Venezuela, je suis abasourdie et je me demande ce qui se passe vraiment dans le reste du monde où je n’ai pas d’amis qui me donnent des informations directes. La plupart du temps, les médias reprennent exactement ce qu’on peut lire au Venezuela dans les médias clairement identifiés comme étant de droite et profondément anti-chavistes. Ce sont des mensonges, déformations et exagérations, au lieu d’une analyse politique des causes de la situation actuelle. Les choses positives et constructives qui se sont également développées depuis plus de 20 ans dans le pays ne sont jamais mentionnées. Aussi, je me rends compte que, malheureusement, beaucoup de gens qui se disent de gauche et qui sur d’autres questions multiplient leurs sources et ont des positions que je partage, se laissent sans hésitation emporter par le discours dominant sur le Venezuela. J’ai du mal à comprendre pourquoi, quand un peuple passe de la résistance à la construction réelle du socialisme, ceux qui ne participent pas à cette expérience semblent frustrés et préfèrent critiquer depuis une perspective théorique, au lieu de soutenir un peuple qui met en jeu toute sa vie, sa force et son courage pour construire son avenir et le futur de la société que nous voulons.

Que penses-tu des sanctions de l’Union européenne ou, par exemple, du blocage de l’argent vénézuélien par l’un des systèmes de transactions financières mondiaux comme Euroclear, situé à Bruxelles, qui affecte le peuple vénézuélien ?

Venant des États-Unis et de l’Europe il n’y avait rien de mieux à attendre. Dans l’histoire du monde ceux qui ont le pouvoir ont toujours essayé d’annuler, d’annihiler et d’éradiquer les expériences de socialismes qui sont nées. En fait, ils l’ont toujours fait avec beaucoup plus de détermination qu’avec l’extrême-droite qu’ils préfèrent, bien qu’ils la « condamnent ». Pour le capitalisme, rien n’est plus dangereux qu’un peuple en révolution.

Il est terriblement cynique que les sanctions « assumées » ces dernières années et que les conséquences directes de ces sanctions soient utilisées pour accuser l’État vénézuélien. Il y a quelques années au Venezuela, quand les marchandises n’entraient plus comme elles l’auraient dû, cela n’était pas considéré comme une sanction.

Malgré le fait que ceux qui se plaignent de la situation économique actuelle sont les gens de la classe moyenne et supérieure de l’opposition, ceux qui souffrent, qui ont faim, qui meurent et qui perdent leurs filles et leurs fils par manque de médicaments… ce sont les pauvres, comme toujours. Ce sont les mêmes qui gardent la tête haute et traversent les rivières et les dangers pour voter en faveur de la Constituante, en faveur du processus parce qu’ils savent que c’est la voie à suivre. Une fois de plus, je déplore que les « gauches » ne dénoncent pas ce blocus avec plus d’unité et de force, qu’elles ne défendent pas les populations victimes de cette guerre non conventionnelle même s’il n’y a pas de consensus sur la politique intérieure du Venezuela. Sans oublier que, comme dans le monde entier, lorsqu’un peuple est attaqué, les premières victimes sont les femmes, elles sont la cible privilégiée de ces attaques. Au Venezuela, il n’y a plus d’accès aux contraceptifs depuis plus de 5 ans – bien avant la mise en place des sanctions illégales. Il est notoire que pour appauvrir un peuple, le moyen le plus efficace et le plus rapide est de mettre les femmes enceintes le plus tôt et le plus souvent possible.

Dans le cadre de VeneSol et du Réseau Européen de Solidarité avec la Révolution Bolivarienne, pourquoi soutenir la défense du processus bolivarien et comment pouvez-vous aider l’Europe ?

Je pense avoir développé dans les questions précédentes les raisons de défendre le processus bolivarien, mais en résumé, je pourrais dire qu’il est aussi nécessaire de défendre le modèle de société construit par le peuple vénézuélien que de lutter contre le réchauffement climatique. L’avenir de la planète et de l’humanité sont en jeu. Et je parle de toute l’humanité, non seulement de l’espèce humaine mais de tous les individus qui la composent et qui ont besoin de vivre en paix, dans le respect de nos diversités.
Pour aider, il est nécessaire de dénoncer le blocus, ce qui permettra de dégager un consensus dans la dénonciation, même s’il n’y a pas de consensus sur le projet d’une société qui défend le Venezuela ; de faire du lobbying politique dans le plus grand nombre d’espaces possibles, de briser le cercle des médias et l’isolement que le Venezuela a subi ces dernières années ; développer des projets de solidarité avec les populations, dans les domaines de l’agronomie, de la santé et de l’éducation, par exemple, mais en mettant l’accent sur l’autonomie et l’autodétermination des populations.

Mais, surtout, je crois que le plus important est de diffuser des informations alternatives et correctes sur ce qui se passe réellement au Venezuela, au lieu de répéter ce que disent les médias dominants. C’est pour cela que nous avons développé le site http://www.venesol.org, qui permet aux francophones de découvrir une autre façon de voir ce pays. Personne ne défend ce qu’il ne connaît pas, et pour défendre le peuple du Venezuela nous devons savoir pourquoi nous le faisons, nous devons savoir comment démonter les mensonges, mais aussi découvrir ce qui se construit et ce dont personne n’a jamais entendu parler, comme les communes, les expériences de solidarité entre les peuples, la destruction quotidienne du capitalisme, du colonialisme et du patriarcat pour construire un socialisme féministe et divers. Et peut-être… s’inspirer de ce qui s’y passe pour construire un monde meilleur, ici. Si nous voulons mettre fin au capitalisme, nous devons être convaincu.e.s qu’un autre monde est possible et que c’est la voie à suivre.

MinMujer - Noticias - 2014-11-26 04-36-28 - Múltiples anuncios realizados durante la instalación del Consejo Presidencial de Gobierno de las Mujeres  

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Traduction : VeneSol, http://venesol.org/2018/12/26/il-est-aussi-necessaire-de-defendre-la-construction-du-modele-du-peuple-venezuelien-que-de-lutter-contre-le-rechauffement-climatique/

Comprendre le blocus contre le Venezuela: 2e partie, les faits.

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Deuxième partie : les faits. 

La chronologie qui suit nous permet de répondre à trois questions essentielles pour comprendre le blocus contre le Venezuela : « Qui impose le blocus ? A qui l’imposent-il ? Et pourquoi ? » (1).

A la lecture des mesures prises, la réponse à la première question saute aux yeux : ce sont les Etats-Unis, suivit par leurs vassaux latino-américains ou européens. Les faits parlent d’eux-mêmes. Cela se passe de commentaires ou d’interprétations douteuses.

La réponse à la deuxième question coule aussi de source. Alors que certains commentateurs s’évertuent à relayer les éléments de langage de l’administration étatsunienne faisant croire qu’il ne s’agit que de sanctions ciblées sur des personnes, la lecture de ce document nous amène à une conclusion logique.  C’est bien le Peuple vénézuélien tout entier qui est visé. Ce qui est d’ailleurs explicitement revendiqué par le pouvoir des Etats-Unis

C’est d’ailleurs pourquoi nous ne mentionnons pas les sanctions contre des membres de l’Etat vénézuélien (sauf dans le secteur de l’alimentation). Démarré en 2008, ces sanctions individuelles touchent aujourd’hui 51 citoyens vénézuéliens.

Quand à la réponse à la dernière question, elle est la conséquence de la deuxième. Il y a d’abord une réponse en terme géopolitique. Le Venezuela dispose des premières réserves de pétrole au monde, des quatrièmes réserves d’or, son sous-sol regorge de minerais (coltan, thorium, bauxite, fer) et c’est un pays riche en eau douce, en gaz et en diamants. Nous comprenons que cela ouvre l’appétit de certains prédateurs.

Mais pourquoi donc vouloir affamer et martyriser un Peuple dans son ensemble ? Tout simplement parce que ce Peuple de combattants refuse systématiquement depuis 1998 de voir sa souveraineté piétinée par un empire aux services des transnationales. Et ce Peuple à la tête dure a déjà résisté à plusieurs tentatives pour le faire revenir dans le droit chemin des intérêts des dominants.

Le peuple vénézuélien a non seulement démontré qu’une autre voie était possible face au néolibéralisme, mais il a donné des leçons de résistance à bien d’autres peuples de par le monde. C’est donc lui qui doit désormais payer cet affront.

Aux opinions politiciennes biaisées, il faut systématiquement opposer les faits. Toutes discussions ou débats sur le pays caribéen doit nécessairement passer par une analyse des mesures de rétorsion contre l’économie du Venezuela.

Après, seulement après, on peut parler de l’effectivité ou pas des politiques du gouvernement, des options économiques, ou des conséquences sociales de la situation actuelle.

Voici donc une chronologie sommaire des attaques financières, bancaires et économiques contre la Révolution Bolivarienne. Elle ne prend pas en compte les autres dimensions de la guerre hybride menée contre le Venezuela tels que les fronts diplomatique, militaire, médiatique, juridique ou institutionnel.

Avant de parler de l’économie, parlons du blocus.

Barbeles

14 avril 2013 : Nicolas Maduro est élu président de la République Bolivarienne du Venezuela avec 50,61% des voix. Son principal opposant, Henrique Capriles Radonski ne reconnaît pas sa défaite, et appelle ses partisans à prendre la rue. Bilan : 11 chavistes assassinés, 65 blessés.

12 février 2014 – mai 2014 : L’opposition tente de renverser le président par la force. Bilan : 42 morts. 850 blessés. Face à l’échec de ce coup d’Etat et considérant les déroutes électorales, une stratégie économique et financière va être mis en place pour étrangler la population du Venezuela et la retourner contre le gouvernement de la Révolution Bolivarienne.

Décembre 2014: Le Congrès des Etats-Unis approuve la loi 113-278 intitulée « Loi publique de défense des droits de l’Homme et de la Société Civile au Venezuela ». Cet instrument juridique dicte la ligne d’action politique du gouvernement de Etats-Unis et de ses vassales contre le Venezuela. La loi 113-278 établit la possibilité de prendre des mesures unilatérales coercitives contre le Venezuela dans les domaines économiques, financiers et commerciales. De plus, elle stipule de « travailler » dans ce sens avec ses partenaires membres de l’Organisation des Etats Américains (OEA) et de l’Union Européenne.

08/03/2015 : Le président des Etats-Unis, Barack Obama, signe l’Ordre exécutif 13692 (le « décret Obama »). Ce dernier se base sur la Loi des Pouvoirs Economiques en situation d’Urgence Nationale, sur la loi d’Urgence Nationale et sur la Loi 113-278 pour déclarer le Venezuela « une menace inhabituelle et extraordinaire pour la sécurité nationale et la politique extérieure des Etats-Unis ». Ce décret va permettre l’élaboration légale des attaques économiques que subit le Venezuela depuis cette date.

Avril 2016 : Le blocus financier commence. A partir de cette date, les institutions vénézuéliennes titulaires de compte bancaires à l’étranger se voient stipuler des restrictions pour la réalisation de paiement en dollars.

Mai 2016 : La Banque Commerzbank (Allemagne) ferme les comptes de plusieurs institutions vénézuéliennes dont ceux des banques publiques vénézuéliennes et ceux de Pdvsa, l’entreprise pétrolière.

Juillet 2016 : La banque étatsunienne Citibank interdit á son réseau d’intermédiaires bancaires d’opérer des transactions avec les institutions vénézuéliennes, dont la Banque Centrale du Venezuela.

Août 2016 : La fermeture unilatérale des comptes d’intermédiaire bancaire oblige le Venezuela à opérer à partir d’autres monnaies alors que la plupart des devises obtenues par la vente de Pétrole sont en dollars. Le pays subit de grosses pertes dues aux nouveaux coûts de transaction, de change et de cout opératifs.

Août 2016 (bis) : La Banque Novo Banco (Portugal) informe l’Etat vénézuélien qu’elle ne réalisera plus d’opération en dollars avec des banques ou des institutions vénézuéliennes, á cause de la pression exercée par ses intermédiaires bancaires.

Juillet 2017 : L’entreprise Delaware (qui gère des portefeuilles de titres de Pdvsa) informe Pdvsa que sa banque intermédiaire (PNC Bank) n’acceptera plus de fonds de l’entreprise pétrolière.

Juillet 2017 (bis) : La banque étatsunienne Citybank refuse de recevoir un paiement de l’Etat vénézuélien destiné à l’achat de 300.000 doses d’insuline.

21/08/2017 : La Bank Of China basé au Panama informe le Venezuela, que suite à des pressions reçues de la part du Département du Trésor des USA ainsi que du gouvernement du Panama, elle ne réalisera plus aucune transaction en dollars de ou à destination du Venezuela.

22/08/2017 : Plusieurs banques russes informe le Venezuela de l’impossibilité de réaliser des transactions avec des banques vénézuéliennes en raison de la restriction imposée par les banques intermédiaires des Etats-Unis et de plusieurs pays européens.

23/08/2017 : La banque intermédiaire de l’institution bancaire BDC Shandong stoppe une transaction de la Chine vers le Venezuela d’un montant de 200 millions de dollars. Il faudra plus d’un mois pour que le Venezuela puisse récupérer cette somme d’argent.

24/08/2017 : Donald Trump signe l’ordre exécutif 13808 intitulé « Imposition de sanctions additionnelles à propos de la situation au Venezuela ». Ce décret interdit toute une série de transaction avec l’Etat vénézuélien, et notamment avec Pdvsa, et tout autres entités détenues par l’Etat vénézuélien. Est établie une liste de restriction aux opérations financières :

  •   L’Etat vénézuélien et Pdvsa sont interdits d’émettre de nouveaux titres de leur dette
  •    Interdiction de réaliser des transactions sur les titres émis par le gouvernement avant l’entrée en vigueur de ce décret.
  •  Le versement de dividendes ou de bénéfices au gouvernement du Venezuela de la part d’entités résidant aux USA est interdit. Cela affecte avant tout Citgo, entreprise appartenant à Pdvsa, et qui compte 3 raffineries et 6000 stations d’essence sur le territoire des Etats-Unis.
  •   L’achat de certains bons du trésor vénézuélien et de la dette vénézuélienne est interdit.

La maison blanche déclare que cet ensemble d’interdiction a « été soigneusement pensé pour refuser à la dictature de Maduro une source non négligeable de financement »

Le décret 13808 vise à systématiser les attaques contre les entreprises publiques et les opérations commerciales et financières de l’Etat vénézuélien afin de déstructurer l’économie du pays. A ce sujet, l’ancien ambassadeur des Etats-Unis au Venezuela et en Colombie, Wiliam Brownfield a déclaré : « La meilleure résolution est de précipiter l’effondrement du gouvernement vénézuélien même si cela implique des mois et des années de souffrance pour les vénézuéliens».

Août 2017 : Suite à des pressions du Département du Trésor des Etats-Unis, l’entreprise Euroclear, une filiale de la banque américaine JP Morgan, congèle les opérations de transaction sur la dette souveraine du Venezuela. Euroclear retient ainsi,  depuis lors, 1 milliard 200 millions de dollars appartenant á la République Bolivarienne du Venezuela.

Août 2017 (bis):La Bank of China de Francfort refuse d’émettre une transaction de 15 millions de dollars, du par le Venezuela à l’entreprise minière Gold Reserve.

05/09/2017 : Le Canada et les Etats-Unis s’associent pour « adopter des mesures économiques contre le Venezuela et contre les personnes qui contribue activement à la situation actuelle dans le pays ».

Octobre 2017 : La Deutsche Bank informe la banque chinoise Citic Bank de la fermeture de ses comptes chez ses intermédiaires bancaires pour avoir accepter des paiements de Pdvsa.

Octobre 2017 (bis): Le Venezuela achète des vaccins et des médicaments á l’Organisation Panaméricaine de la Santé, filiale de l’Organisation Mondiale de la Santé, et donc sous l’égide de l’ONU.

En vertu de l’extraterritorialité des lois états-uniennes, la banque suisse UBS rejettera le paiement, provoquant un retard de 4 mois dans la livraison des vaccins et déstructurant complètement le système public de vaccination gratuite du ministère de la santé vénézuélien.

03/11/2017 : Le président Maduro annonce que le Venezuela a remboursé plus de 74 milliards de dollars à ses créanciers sur les quatre dernières années. Malgré cela, les agences de notations font augmenter le risque-pays du Venezuela, rendant plus difficile l’obtention de crédits sur les marchés financiers.

09/11/2017 : EEUU sanctionne un groupe de fonctionnaires vénézuéliens au motif de « piétiner la démocratie et administrer les programmes gouvernementaux corrompus de distribution d’aliments ». Les fonctionnaires responsables de l’importation d’aliments dans le pays ne peuvent plus signer d’accord commerciaux favorisant la politique alimentaire du gouvernement.

13/11/2017 : L’Union européenne interdit la vente de matériel de défense ou de sécurité intérieur au Venezuela.

14/11/2017 : L’agence de notation Standard and Poor’s déclare un « défaut partielle » du Venezuela malgré les paiements réguliers de la dette par le Venezuela.

15/11/2017 : La Deutsche Bank, principal intermédiaire de la Banque Centrale du Venezuela ferme définitivement les comptes de cette institution, mettant en danger toutes ses opérations bancaires.

Novembre 2017 : Le Venezuela achète des médicaments anti-malaria (primaquine et cloroquine) au laboratoire colombien BSN Medical. Le gouvernement de Colombie empêche la livraison sans aucune justification.

Novembre 2017 (bis):Les transnationales pharmaceutiques Baster, Abbot, et Pfizer refusent d’émettre des certificats d’exportation à destination du Venezuela, rendant impossible l’achat de médicaments produits par ces entreprises, notamment dans le domaine oncologique.

Novembre 2017 (ter): Les banques intermédiaires refusent plusieurs transactions du Venezuela à hauteur de 39 millions de dollars. Cette somme était destinée à 23 opérations d’achats alimentaires pour les fêtes de fin d’année.

29/01/2018 : Le département du Trésor des Etats-Unis affirme « la campagne de pression contre le Venezuela porte ses fruits. Les sanctions financières que nous avons imposé ont obligé le gouvernement de ce pays à commencer à entrer en défaut de paiement, tant pour sa dette souveraine comme pour celle de Pdvsa. Et nous pouvons assister (…) à un effondrement économique total du Venezuela. Donc notre politique fonctionne, notre stratégie fonctionne et nous la maintiendrons. »

12/02/2018 : Le département du Trésor des Etats-Unis élargit les sanctions financières contre le Venezuela et les entreprises vénézuéliennes. La renégociation et la restructuration de la dette vénézuélienne et de celle de Pdvsa émise avant le 25 aout 2017 sont interdites.

Mars 2018 : 15 boxeurs vénézuéliens n’ont pas pu participer aux qualifications pour les Jeux d’Amérique Centrale et des Caraïbes 2018 parce qu’ils n’ont pas pu arriver à un accord avec les agences qui ont mis diverses limites parmi lesquelles le prix du billet qui est passé de 300 à 2 100 dollars par personne quand l’entreprise a appris qu’il s’agissait du transport de la Fédération Vénézuélienne de Boxe.

Lorsque, ensuite, une compagnie privée a proposé un vol charter pour transporter l’équipe, la Colombie et le Panamá n’ont pas autorisé le survol de leurs espaces aériens et le Mexique a fait la même chose.

02/03/2018 : Les Etats-Unis renouvellent, pour un an, les décrets 13692 (Obama) et 13808 (Trump). Le décret 13808 impose six nouvelles mesures coercitives pour attaquer la stabilité financière du Venezuela. Le Bureau des Crimes Financiers des Etats-Unis (FinCEN) alerte les institutions financières mondiales que les transactions avec des entités publiques vénézuéliennes sont suspectées de corruption. Cette accusation sans fondement ni preuve a pour conséquence de freiner le paiement à des entreprises d’alimentation et à des laboratoires pharmaceutiques, rendant difficile l’importation de ces biens. De même, cela aura pour conséquence le gel d’1 milliard 650 millions de dollars appartenant à l’Etat vénézuélien.

19/03/2018 : Le président Trump signe l’ordre exécutif 13827 qui interdit à tout citoyens et institutions d’effectuer des transactions financières avec la cryptomonnaie vénézuélienne « Petro » avant même que celle-ci puisse se négocier sur les marchés de cryptomonnaie. Cette décision est la première du genre dans la courte histoire des cryptomonnaies.

27/03/2018 : Le gouvernement du Panama publie une liste de seize entreprises vénézuélienne suspectées sans preuve de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme.

19/04/2018 : Steven Mnuchin, le secrétaire au Trésor des USA se réunit avec des représentants d’Allemagne, d’Argentine, du Brésil, du Canada, de Colombie, d’Espagne, de France, du Guatemala, d’Italie, du Japon, du Mexique, du Panama, du Paraguay, du Pérou, et du Royaume Uni pour leur demander des « actions concrètes afin de restreindre la capacité des fonctionnaires vénézuéliens corrompus et de leurs réseaux de soutien ». Il affirmera que le Président Nicolas Maduro ne possède aucune légitimité pour demander des crédits au nom de son pays. L’objectif est d’assécher financièrement le Venezuela.

Mai 2018 : 9 millions de dollars de l’Etat vénézuélien sont congelés. Ils étaient destinés au traitement de la dialyse. 20.000 patients en seront privés.

Mai 2018 (bis) : La banque italienne Intensa Sanpaolo bloque l’argent destiné à la mise en place du pavillon du Venezuela à la XVI° Biennale d’Architecture de Venise.

21/05/2018 : En raison de la réélection de Nicolas Maduro à la présidence, Donald Trump renforce les sanctions. Il sera désormais interdit à tous citoyens et entreprises des Etats-Unis d’acquérir des propriétés appartenant au gouvernement du Venezuela sur le territoire des Etats-Unis.

25/06/2018 : Le Conseil européen adopte la décision 2018/901 sanctionnant des membres de l’administration vénézuélienne dont ceux opérant dans le secteur de l’alimentation. Cette mesure fait écho à celle prise un an plus tôt par les Etats-Unis (le 9 novembre 2017) afin de rendre impossible l’achat d’aliments par le gouvernement vénézuélien.

01/11/2018 : Le président Trump signe un nouveau décret autorisant le Département du Trésor à confisquer des propriétés à des opérateurs du secteur aurifère au Venezuela, sans que des accusations pénales ou civiles soient nécessaires. Le but recherché est d’empêcher la récupération par l’Etat vénézuélien du bassin minier de l’Orénoque, 4eréserve d’or au monde.

Le Secrétaire adjoint du Trésor des Etats Unis, Marshall Billingslea dans un cynisme absolu, déclarera à ce sujet : « Nous devrions manifester plus d’indignation face aux dommages infligés à l’environnement et aux populations indigènes ».

09/11/2018 : La Banque Centrale du Royaume Uni refuse de restituer au Venezuela 14 tonnes d’or appartenant à ce pays. Il s’agit ni plus ni moins d’une spoliation d’une valeur de 550 millions de dollars.

Voilà, maintenant on peut parler du Venezuela et confronter les points de vue.

Romain Migus

Note :

(1) J’emprunte ces questions pour leur grande pertinence à Carlos Mendez Tovar, écrivain vénézuélien, interviewé par Viktor Dedaj au sujet du blocus contre….Cuba.

Voir Viktor Dedaj, « Sin Embargo – Paroles cubaines contre le blocus », LeGrandSoir, disponible sur https://www.legrandsoir.info/IMG/pdf/sin_embargo_paroles_cubaines_viktor_dedaj.pdf

Source : https://www.romainmigus.info/2018/11/comprendre-le-blocus-contre-le_27.html