Le BRICS, l’UNASUR et la CELAC dessinent une nouvelle carte du monde multipolaire

¨L'axe du mal¨pour les grands médias occidentaux tend à s'étoffer puisqu'il représente à présent près de la moitié de la population mondiale. De Cristina Fernandez à Evo Morales (premier rang) et de José ¨Pepe¨Mujica à Nicolas Maduro (second rang), l'Amérique Latine a rencontré les BRICS * à Fortaleza, du 14 au 16 juillet 2014. * (Brésil, Russie, Inde, Chine et  Afrique du Sud).

¨L’axe du mal¨ tend à s’étoffer puisqu’il représente déjà près de la moitié de la population mondiale… De Cristina Fernandez à Evo Morales (premier rang) et de José ¨Pepe¨ Mujica à Nicolas Maduro (second rang), l’Amérique Latine a rencontré les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) à Fortaleza (Brésil) du 15 au 16 juillet 2014.

¨On nous en parle depuis si longtemps, de la nécessité d’une ¨nouvelle architecture financière¨. Nous y voilà, enfin !¨ s’est exclamé Nicolas Maduro lors de la rencontre des chefs d’État latino-américains avec ceux du BRICS. ¨Avec notre Banque du Sud et celle du BRICS, nous pouvons enfin nouer des alliances pour nous développer et pour lutter contre la pauvreté, libérés du chantage du FMI, du dollar et des spéculateurs internationaux qui ont fait des dettes extérieures un mécanisme de domination. C’est pourquoi la lutte actuelle de l’Argentine est notre lutte à tous.¨ 

Par Alberto Cova

Caracas, 24 juillet AVN – Le « nouvel ordre mondial« , surgi des Accords de Bretton Woods qui ont établi les règles de l’échange financier global et ont mis en place l’hégémonie du dollar à perpétuité dans les transactions internationales est trop usé pour rester un paradigme de la domination planétaire. Le 22 juillet 1944, il y a exactement 70 ans, s’achevait la réunion dans un hôtel du New Hampshire dans laquelle les Etats-Unis firent prévaloir leurs intérêts devant les délégués de 44 pays et imposèrent la planche à billet illimitée du dollar pour remplacer l’or en tant qu’étalon de la valeur de chaque monnaie dans le monde. C’est là que sont nés le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale, deux institutions qui, depuis lors ont fixé les normes de l’impérialisme économique et ont décidé du sort de peuples entiers. Mais la planète a changé pendant ces 7 décennies : le déclin des Etats-Unis et de ses satellites européens semble inévitable alors que le modèle hégémonique né de Bretton Woods est confronté à de nouvelles approches venues d’autres centres de pouvoir et d’alliances toujours plus vigoureuses entre des pays qui s’opposent aux directives élaborées par Washington pour son propre profit.

Alicia Barcena, secrétaire exécutive de la Commission Économique pour l'Amérique Latine et les Caraïbes (CEPAL, organisme de l'ONU)

Alicia Barcena, Secrétaire Exécutive de la Commission Économique pour l’Amérique Latine et les Caraïbes (CEPAL, organisme de l’ONU)

Pendant que l’empire états-unien lutte encore contre les effets de l’explosion de la bulle spéculative de 2008 et que les pays d’Europe sont pris dans les crises sociales et les dysfonctionnements de leur monnaie unique, un groupe de pays émergents prend l’initiative de la création de deux organismes multilatéraux qui se substitueront aux tout-puissants FMI et BM dans une limite de compétence qui comprend, pour l’instant, la moitié de la population mondiale, 30% du produit intérieur brut global et 23% de la surface de la terre. Le groupe du BRICS (Brésil, Inde, Russie, Chine et Afrique du Sud) a décidé lors de son récent sommet au Brésil de créer une banque de développement (la New Development Bank, NDB) et un fonds de réserve (le Contingency Reserve Arrangement, CRA), qui rempliront les mêmes fonctions que celles pour lesquelles sont été créés le FMI et la BM, c’est à dire, mobiliser des ressources pour financer des projets d’infrastructure et servir de mécanisme préventif face à des épisodes de volatilité financière. Il s’agit de l’accord financier multilatéral le plus important depuis la création des institutions de Bretton Woods, selon Alicia Barcena, la secrétaire exécutive de la Commission Economique pour l’Amérique Latine et les Caraïbes (CEPAL).

Chacune de ces institutions aura un capital de 100 000 millions de dollars pour ses tâches de financement de projets et de protection monétaire des pays signataires. « Le nombre croissant de crises qui ont été enregistrées au niveau mondial à partir des années 80 dans les pays développés et en développement (4 dans les années 70, 38 dans les années 80 et 74 dans les années 90) démontre que la volatilité et l’instabilité sont des maux endémiques qui se sont renforcés à cause de la globalisation financière croissante et que les pays développés sont aussi vulnérables face aux aléas des marchés financiers et de leurs effets de contagion que les pays en développement« , a dit Barcena en commentant les résultats de la réunion de Fortaleza.

Ainsi, on peut affirmer que l’accord BRICS pour la création d’une banque de développement et d’un fonds de réserve a des dimensions historiques. On peut dire la même chose des méga-contrats signés en mai par la Russie et la Chine pour la fourniture de gaz russe à Pékin pour un montant de 400 000 millions de dollars qui pourra être négocié en Yuans et en Roubles, abandonnant le dollar. Un des accords souscrits entre les géants d’Etat russe et chinois , Gazprom et CNPC, stipule la fourniture de combustible au pays asiatique pendant 30 ans tandis que l’accord entre la Banque de Chine et le VTB, le second groupe bancaire le plus important de Russie, envisage d’effectuer les paiements réciproques dans les devises nationales.

Un vent nouveau porteur d’idées sur le développement soutenable et inclusif souffle sur la scène mondiale, venant du BRICS et d’Amérique Latine, secoue les bases qui soutiennent l’ordre mondial dessiné en 1944 par les Accords de Bretton Woods. Le surgissement du BRICS comme moteur de l’économie globale à cause de ses taux soutenus de croissance élevée, remet en cause l’ordre financier établi depuis la Seconde guerre Mondiale. La nouvelle architecture financière globale d’un monde toujours plus multipolaire, n’aura plus le dollar comme centre de gravité et les institutions surgies des Accords de Bretton Woods n’exerceront plus le rôle de direction qui leur fut assigné et que les intérêts transnationaux se sont approprié.

Le BRICS étend son influence en Amérique Latine.

Le président équatorien Rafael Correa avec les dirigeants du BRICS

Le président équatorien Rafael Correa avec les dirigeants du BRICS et de l’UNASUR

Le 6° sommet des pays du BRICS qui a eu lieu au Brésil du 15 au 16 juillet a été suivi avec intérêt dans le monde entier, aussi bien par les Etats-Unis et d’autres pays riches qui parient sur l’affaiblissement de cette instance que par les nations qui voient dans le BRICS une alternative vers un ordre mondial plus démocratique et équitable.

Dans la réunion des présidents du bloc, on a débattu comme thème central, de « la croissance inclusive: solutions soutenables« , dans le but d’avancer dans le développement de politiques de croissance économique d’un point de vue social. Dans leur déclaration finale, les pays du BRICS ont déclaré qu’ils « continueront à donner un rôle important à la promotion du développement social et à contribuer à la mise en place d’un agenda international dans cette limite, sur la base de leur expérience dans la recherche de solutions aux défis de la pauvreté et des inégalités« . Ils appellent aussi instamment à conclure les négociations internationales sur le changement climatique par un accord légalement obligatoire de l’ONU sur le changement climatique en tenant compte des « responsabilités communes mais différentes et des capacités respectives« .

D’autre part, ils se sont engagés à établir un programme de travail pour conclure les négociations commerciales de la Ronde de Doha afin de construire un système commercial multilatéral ouvert, inclusif, non discriminatoire, transparent et basé sur des normes. Ils ont exprimé leur désaccord et leur sérieuse préoccupation avec le fait que le FMI n’a pas mis en place les réformes décidées en 2010 et ont demandé à la Banque Mondiale des structures de gouvernement plus démocratiques et un « renforcement de sa capacité financière« . Ils ont manifesté, de même, leur préoccupation pour l’impact négatif de l’évasion fiscale,de la fraude et de la planification fiscale transnationale agressive dans l’économie globale. « Les faits se sont chargés de mettre en évidence que le développement économique, la stabilité sociale, la concentration et la collaboration ainsi que la croissance conjointe des pays du BRICS qui représentent 42,6% de la population mondiale, concordent avec les tendances de l’époque marquées par la paix, le développement et la coopération, apportant comme bénéfices une économie mondiale plus équilibrée, une gouvernance globale plus efficace et des relations internationales plus démocratiques« , a déclaré le président de la Chine, Xi Jinping.

Dilma Roussef a dit que les accords signés prouvent la dimension historique de ce forum qui, lors de son 6° Sommet, a gagné en densité politique et en poids financier. « Les pays émergents continuent à être la force motrice de l’expansion globale et devraient continuer à l’être dans l’avenir« , a noté la présidente du Brésil. Le gouvernement d’Afrique du Sud s’est montré satisfait des résultats du 6° Sommet du BRICS et a indiqué que toutes les résolutions et toutes les déclarations adoptées lors du sommet l’ont été après des délibérations et des accords sur une base d’égalité.

Une géopolitique pour le développement.

Après le Sommet du BRICS qui a eu lieu à Fortaleza, les leaders des cinq économies émergentes se sont rendus à Brasilia, où ils ont rencontré les 11 présidents des pays latino-américains regroupés dans l’Union des Nations Sud-américaines (UNASUR). Les 16 élus ont discuté au Palais Itamaraty, siège de la chancellerie du Brésil, sur une feuille de route concernant : « La croissance incluante et solutions soutenables« . Plusieurs des présidents ont abordé le thème de la croissance inclusive, parmi eux la présidente chilienne, Michelle Bachelet, qui a appelé à travailler pour vaincre les inégalités afin d’obtenir un développement inclusif et soutenable. La chef de l’Etat argentine, Cristina Fernandez, a défendu « une réorganisation financière globale qui inclue les besoins de croissance, de production et non de destruction de l’emploi, l’abandon des sociétés qu’ont vécues depuis tant d’années les Américains du Sud. »

Le président Maduro à la plenière de l'Assemblée BRICS-UNASUR

Le président Maduro à la plenière de l’Assemblée BRICS-UNASUR

Le président du Venezuela, Nicolas Maduro, considère cette rencontre entre le BRICS et l’UNASUR comme productive car elle initie une nouvelle géopolitique mondiale pour le développement, la prospérité et la paix des peuples. » « Nous avons proposé aussi une alliance de travail entre la Banque du Sud et la naissante Banque du BRICS qui ont le même but : une nouvelle architecture financière qui bénéficie au développement économique, et de conditions d’équité pour nos pays, en plus de promouvoir l’économie productive, créatrice de travail et de richesses. » Le président Maduro a indiqué que le Venezuela demandera au prochain sommet de l’UNASUR qui aura lieu en août à Montevideo qu’on désigne une commission pour s’occuper du travail en commun avec le BRICS. « Nous avons des processus convergents, nous allons faire tous nos efforts et nous allons mettre toute notre volonté politique pour que le BRICS et l’UNASUR commencent à marcher ensemble à partir de maintenant. » Il est important de souligner que la déclaration finale du 6° Sommet du BRICS met en avant « les processus d’intégration d’Amérique du Sud et en particulier, l’importance de l’UNASUR« . Avec une nouvelle géopolitique mondiale dans laquelle les Etats-Unis ne peuvent soutenir leur hégémonie économique, l’inter-relation UNASUR-BRICS ouvre un éventail de d’opportunités pour le développement de l’Amérique du Sud.

La Chine se rapproche de la CELAC.

Cristina Fernandez et

La présidente argentine Cristina Fernandez et le Président chinos Xi Jinping.

La présence du président chinois Xi Jinping au Brésil a servi à activer le Forum Chine-CELAC, une instance de contact multilatéral créée lors du II° Sommet de la CELAC, tenu en janvier dernier à La Havane (1), dans le but d’approfondir les relations de l’Amérique Latine avec le géant asiatique. A cette rencontre ont participé le président de la République de Chine, Xi Jinping et les élus qui composent le quatuor de la CELAC: celui du Costa Rica, Luis Guillermo Solis, actuellement président de l’organisme; celui de Cuba, Raúl Castro; celui de l’Equateur, Rafael Correa et le premier ministre d’Antigua et Barbuda, Gaston Browne. Y ont participé aussi l aprésidente hôtesse, Dilma Roussef, ses homologues du Venezuela, Nicolas Maduro, du Chili, Michelle Bachelet, d’Uruguay, José Mujica, de Colombie, Juan Manuel Santos, de la Guyana, Donald Ramotar et du Suriname, Désiré Bouterse.

Dans le document final, les présidents de la CELAC signalent qu’ils ont approuvé la création de ce forum en tenant compte de la croissance soutenue des relations politiques, commerciales, dans l’investissement, les sciences et la technologie, la culture, l’éducation et dans d’autres domaines, entre la République Populaire de Chine et les pays d’Amérique Latine et des Caraïbes pendant ces 10 dernières années.

Le président Nicolas Maduro a souligné que cette réunion a ratifié les relations de respect entre « un géant du monde comme la Chine et nous, l’Amérique Latine et les Caraïbes, qui peu à peu, allons faire le chemin pour nous transformer tous ensemble en une région puissante« . Le président vénézuélien a indiqué qu’avant la réunion des chanceliers qui aura lieu en Chine en janvier 2015, « on doit établir des mécanismes pour accéder aux 20 000 millions de dollars de crédit pour le développement d’infrastructures que le président de la Chine a annoncés et aux 5 000 millions de dollars du fonds de Coopération Economique pour des projets de manufacture et de commerce. » La présidente du Brésil, Dilma Roussef, a indiqué que lors du forum Chine-CELAC, des accords en matière d’énergie, de défense, de transports et de technologie, ont été signés.

La tournée latino-américaine de Vladimir Poutine.

L’intention des pays du BRICS de se rapprocher de l’Amérique Latine pour connaître les processus de changement en marche dans la région a été manifestée aussi par la Russie, dont le président, Vladimir Poutine, a fait une tournée en Amérique Latine qui a compris des visites officielles à Cuba, en Argentine et au Brésil. A Cuba, Poutine a rencontré Raúl et Fidel Castro. Et à l’occasion de cette tournée, les entreprises d’Etat russes Rosnef et Zarubezhneft ont signé des accords commerciaux pour l’exploitation pétrolière en haute mer. En Argentine, Cristina Fernandez et Vladimir Poutine ont signé des accords de coopération en matière de communications, d’assistance juridique réciproque en matière pénale et de coopération dans l’utilisation de l’énergie nucléaire pacifique. La présidente Cristina Fernandez a souligné que son gouvernement a « un grand désir d’approfondir ses relations avec la Russie » alors que Poutine a qualifié de « stratégiques » les relations entre les deux pays.

La présidente du Brésil Dilma Roussef et le président russe Vladimir Poutine

La présidente du Brésil Dilma Roussef et le président russe Vladimir Poutine

Au Brésil, Dilma Roussef et Vladimir Poutine ont réaffirmé leur objectif de doubler la valeur du commerce bilatéral pour qu’il atteigne 10 000 millions de dollars par an. Poutine a proposé d’explorer la possibilité de négocier un accord de coopération entre l’Union des Nations Sud-américaines et l’Union Economique Euro-asiatique dont son pays fait partie avec la Biélorussie et le Kazakstan. Dans la capitale brésilienne, Vladimir Poutine a rencontré le président du Venezuela, Nicolas Maduro. Pendant leur rencontre, Poutine a souligné le rôle du leader de la Révolution Bolivarienne, Hugo Chavez, dans la construction de cette relation stratégique entre le Venezuela et la Russie et a approuvé une nouvelle ligne de crédit. Le président russe a rappelé son amitié avec le commandant Chavez et a manifesté son affection pour le peuple vénézuélien et le gouvernement que dirige Nicolas Maduro.

Xi Jinping à Caracas.

Après sa visite au Brésil, le président chinois Xi Jinping s’est envolé pour Caracas pour rencontrer son homologue vénézuélien Nicolas Maduro et discuter de projets d’investissement, principalement dans le domaine pétrolier. Nicolas Maduro et Xi Jinping ont participé à la clôture de la XIII° Commission Mixte de Haut Niveau Venezuela-Chine, mise en place dans le but de contrôler les avancées des projets bilatéraux. Cette instance est organisée en 5 sous-commissions: énergétique et minière, économico-commerciale, scientifique, technologique et aérospatiale, culturelle et éducative, agricole. Les deux présidents ont signé 16 des 32 accords bilatéraux signés en matière d’énergie, d’infrastructures, de finances, de technologie et d’aliments. La création d’une entreprise mixte qui se chargera de produire des produits chimiques pour l’agriculture et des fertilisants a été décidée. Des alliances ont été souscrites pour la production de ciment et la construction de nouvelles unités d’habitation dans le pays.

Un des satellites vénézuéliens lancés en 2012 à la suite d'un accord avec la Chine.

Un des satellites vénézuéliens lancés en 2012 à la suite des accords avec la Chine.

De même, a été décidée la création d’un nouveau satellite qui s’ajoutera aux 2 satellites, Simon Bolivar et Miranda, fabriqués et mis en orbite grâce à la coopération sino-vénézuélienne. Un autre des accords concerne le renouvellement d’une ligne de crédit de 4.000 millions de dollars qui iront au fonds Conjoint Chine-Venezuela, un mécanisme créé pour financer des projets d’infrastructures, de logements, de transport et de commerce.

Depuis 2001, date de création de la Commission Mixte de Haut Niveau Venezuela-Chine, 480 accords ont été souscrits, qui ont permis de réaliser 143 projets dans différents domaines d’association stratégique, projets qui permettent un développement partagé entre les deux pays. Le président Maduro a souligné que la Chine « ne fait pas peser une dette sur le pays, il s’agit d’un financement et pour cela, on fournit du pétrole. C’est une formule vertueuse qui permet un financement et ne crée pas de dettes lourdes comme cela arrivait du temps de la Quatrième République, en ces temps de pillage de la patrie. » « Nous injectons une nouvelle vitalité dans cette association stratégique complète Chine-Venezuela« , a déclaré le président chinois Xi Jinping lors d’une réunion avec le président de l’Assemblée Nationale, Diosdado Cabello.

Bref, l’Histoire prend un nouveau tournant.

Note : 

(1) Sur le IIème Sommet de la CELAC, voir https://venezuelainfos.wordpress.com/2014/02/01/iieme-sommet-de-la-celac-a-la-havane-retour-en-force-de-lequilibre-du-monde-de-bolivar-et-de-marti/

Traduction Françoise Lopez

Source : http://www.avn.info.ve/contenido/brics-unasur-y-celac-dibujan-nuevo-mapa-multicéntrico-y-pluripolar

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Banque Mondiale : le Venezuela et l’Uruguay ont le plus haut pouvoir d’achat d’Amérique Latine

comprasParmi les mythes fondamentaux de la désinformation sur le Venezuela, il y a celui de la ¨faillite¨ – avec le rappel constant par les grands médias de la forte inflation actuelle – mais sans prendre en compte l’ensemble de l’économie et surtout comment vivent les vénézuéliens. La baisse continue du chômage. les 26 hausses du salaire minimum et des pensions depuis quinze ans, la croissance positive depuis plusieurs années ou la hausse constante des réserves internationales (+ 132 millions de dollars annoncés le 2 mai par la Banque Centrale du Venezuela) montrent que là comme sur le reste, il vaut mieux conclure au contraire de ce que martèlent ces médias depuis que les vénézuéliens ont dit non au néo-libéralisme en 1998.

Le Venezuela et l’Uruguay dépassent le Mexique – deuxième économie de la région qui passe au troisième rang pour le PIB par habitant. Ce n’est pas le gouvernement bolivarien qui l’affirme, c’est la conclusion du rapport du Programme de Comparaison Internationale (PCI), publié le 2 mai 2014. Le PCI (ICP en anglais) est une initiative qui regroupe et mesure 199 pays, hébergée par la Banque Mondiale et à laquelle collaborent des organismes régionaux des Nations Unies et l’Organisation pour la Coopération et le Développement Économiques.

Quand il s’agit de comparer le PIB de pays différents il convient d’homogénéiser l’information car chaque pays mesure son PIB dans sa monnaie locale. Le PIB est ici converti en une monnaie commune, exprimée en parité de pouvoir d’achat et de dépense réelle (PPA), méthode qui permet de comparer tous les pays du monde parce qu’elle prend en compte la taille des économies, le niveau des prix, les types de change et l’inflation de chaque pays. Le revenu réel par habitant, mesuré en PPA, a augmenté en Uruguay à 17 mille 343 dollars; celui du Venezuela s’est situé à 16 mille 965 dollars et celui du Mexique à 16 mille 377 dollars. En quatrième et cinquième lieu sont arrivés le Panama, avec 15 mille 369 dollars et le Brésil, avec 14 mille 639 dollars, toujours selon cette même mesure du PPA.

En Amérique Latine le PIB moyen par habitant atteint 12 mille 433 dollars; dans les Caraïbes il se monte à 16 mille 351 dollars. Des chiffres qui triplent le PIB de l’Afrique (4 mille 44 dollars), dépassent celui de la région Asie-Pacifique (7 mille 621 dollars) et font à peu près le tiers de celui des pays avancés. La moyenne mondiale est de 13 mille 460 dollars.

Si l’Uruguay, le Venezuela, le Mexique, Panama et le Brésil ont les PIB per capita les plus élevés de la région, les plus bas correspondent à Haïti avec 1.557 dollars; le Nicaragua avec 4 mille 111 dollars; le Honduras avec 4 mille 349 dollars et la Bolivie avec 5 mille 557 dollars, toujours selon la mesure PPA.

La mesure par le PCI du niveau des prix dans chaque pays permet de déterminer quels sont les pays les plus chers sur une échelle de 1 à 100 où 100 correspond à la moyenne mondiale. Les pays les plus chers sont la Suisse, la Norvège, les Bermudes, l’Australie et le Danemark dont les indices vont de 210 à 185. Les États-Unis occupent la 25ème position, après des pays comme la France, l’Allemagne, le Japon et le Royaume-Uni. En Amérique Latine le pays le plus cher est le Brésil, avec un indice de 165; Le Venezuela, avec un indice de 84, se situe quant à lui sous la moyenne mondiale.

Source : Roberto González Amador, La Jornada (Mexique)

Sur le mythe de la ¨faillite économique au Venezuela, on lira avec fruit :

– ¨L’apocalypse tant espérée n’aura pas lieu¨ de l’économiste Mark Weisbrot (CEPR, Washington)

¨Mai 2014, Maduro annonce une nouvelle augmentation du salaire minimum et des pensions¨

Confiance des citoyens latino-américains dans la démocratie : record au Vénézuéla, agonie au Mexique (ONG Latinobarometro / John L. Ackerman)

Le Venezuela hors de LCP (« la caverne de platon ») : pays le plus heureux d’Amérique Latine selon des experts de l’ONU, 2ème selon l’université de Columbia et 5ème pays le plus heureux du monde selon Gallup.

Traduction : Thierry Deronne

URL de cet article : https://venezuelainfos.wordpress.com/2014/05/05/banque-mondiale-le-venezuela-et-luruguay-ont-le-plus-haut-pouvoir-dachat-damerique-latine/

“La récupération économique du Venezuela est-elle durable ?” : le rapport du CEPR (Washington).

Le Centre de Recherches Économiques et Politiques (CEPR), basé à Washington, vient de publier ce 26 septembre 2012 son dernier rapport  intitulé La récupération économique du Venezuela est-elle durable ?”.

Mark Weisbrot

Mark Weisbrot, directeur du CEPR, rappelle que durant les treize années de gouvernement Chávez, la majorité des experts ont annoncé un effondrement économique imminent mais que « ces prévisions étaient basées sur des désirs, non sur des données concrètes”.

Le CEPR indique que la modification apportée par le président vénézuélien à la politique pétrolière a permis de créer “des fonds pour l’investissement dans le secteur social” et que « le Venezuela a construit 2,5 fois plus de logements que les États-Unis en 2011 : chiffres importants si on les compare à la population vénézuélienne« . La construction d’oeuvres civiles a augmenté de 22% en 2011, impulsée par la Grande Mission Logement (Gran Misión Vivienda), qui a construit 147 mille logements jusqu’à l’an dernier et planifie d’en construire 200 mille de plus jusqu’à la fin de 2012.

L’étude mentionne les fonds de développement sino-vénézuéliens, le contrôle des changes, le contrôle des finances publiques et les grands investissements comme facteurs-clefs pour asseoir la stabilité économique du pays. La disponibilité à présent vérifiée de la majeure réserve de pétrole du monde, « près de 500 milliards de barils” et la stabilité politique depuis le retour de l’économie pétrolière sous contrôle de l’État, confèrent au Venezuela “la capacité de maintenir des taux solides de croissance économique.

Le rapport analyse en détail la réaction de l’actuelle équipe gouvernementale face aux deux récessions économiques, en 2003 et en 2009.

La première récession fut la conséquence du coup d’État contre le président Chavez en 2002 et du lock-out des gérants pétroliers en 2002-3. Ce sabotage de la part des cadres supérieurs de Pdvsa (Petróleos de Venezuela) fit chuter la production pétrolière au niveau quasi zéro avec de graves dommages pour le pays. La seconde récession eut lieu à la suite de la chute des prix du pétrole (2008) et de la crise économique mondiale (2009).

Durant la période de récupération économique à la suite du lock-out pétrolier, le Fonds Monétaire International (FMI) avait sous-estimé la reprise de l’économie vénézuélienne, avec des marges de 10,6%, 6,8% et 5,8% pour les années 2004 et 2006. En réalité, l’économie du Venezuela a connu une croissance, respectivement, de 16,8%, 9,3% et 10,3%. »

La seconde récession en 2009 avait assombri les perspectives de croissance. « Or, l’économie vénézuélienne a de nouveau défié la majorité des prévisions par une croissance de 4,2% en 2011 et de 5,6% au premier semestre de 2012”. La CEPAL, organisme des Nations Unies chargé de mesurer le développement économique et social de l’Amérique Latine, table dans son rapport de septembre 2012 sur une croissance de 5 % pour la fin de 2012.

Le rapport de CEPR mentionne le superavit en comptes courants de 24,6 milliards de réserves en US$ (6,6% du PIB dans les 12 derniers mois). « Avec les prévisions de stabilité et l’augmentation des prix du baril de pétrole, un problème dans les paiements internationaux du Venezuela est hautement improbable« .

Sur l’inflation les analystes du CEPR sont optimistes au vu sa baisse continue dans les huit derniers mois (de 27,6% à 19,4%). Sur l’investissement dans les bons du trésor, Weisbrot a signalé qu’il s’agit d’une bonne affaire. “Sur la base de la capacité de paiement de la dette publique et si on se tourne vers le futur, le prix des titres du trésor vénézuélien est certainement sous-évalué« .

Gran Misión Vivienda Venezuela

Gran Misión Vivienda

Les économistes Mark Weisbrot et Jake Johnston concluent que « la récupération de l’économie vénézuélienne, ainsi que l’augmentation de la qualité de vie, la réduction de la pauvreté, l’accès majeur à l’éducation et à la santé, depuis que le gouvernement bolivarien a repris le contrôle de l’industrie pétrolière il y a dix ans, rendent très probable une réélection du président Hugo Chávez le 7 octobre”.

Rapport original intégral (en anglais) : http://www.cepr.net/documents/publications/venezuela-2012-09.pdf

Graphiques du rapport. (Cliquer pour agrandir.)

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Note : nous publions par ailleurs ci-dessous un tableau reprenant les derniers sondages réalisés par les instituts les plus expérimentés (privés ou publics) pour la prochaine élection présidentielle du 7 octobre. En effet, face à une défaite annoncée, il est possible que l’opposition de droite s’appuie de nouveau sur les grands médias pour refuser le verdict des urnes et ignorer les avis positifs exprimés par les observateurs étrangers sur le mode de scrutin. Dans ce cas le plan consisterait à dénoncer la « fraude de Chavez », et à préparer des actes de violence destinés aux agences internationales, etc…

Traduction : Thierry Deronne

URL de cet article : https://venezuelainfos.wordpress.com/2012/09/28/la-recuperation-economique-du-venezuela-est-elle-durable-le-rapport-du-cepr-washington/

Le chapeau de Bolívar, ou les leçons d’économie de Chavez pour l’Europe, par Richard Gott (The Guardian)

Alors que le Venezuela vit la conjonction inédite d’un boom de croissance et d’une baisse de l’inflation, grâce à l’intensification des investissements sociaux, la construction massive de logements, le contrôle des prix en faveur des secteurs populaires; alors que le salaire minimum est le plus élevé du continent, nous publions le point de vue de l’historien Richard Gott, ex-rédacteur en chef du Guardian, auteur entre autres de « In the Shadow of the Liberator: The Impact of Hugo Chávez on Venezuela and Latin America », Verso, 2001; « Cuba: A New History”, Yale University Press, 2004; et de « Britain’s Empire: Resistance, Repression and Revolt », Verso, 2011. 

Richard Gott

Le chapeau de Bolívar

Les leçons d’économie de Chavez pour l’Europe

Il y a quelques années, alors que je voyageais dans l’avion présidentiel de Hugo Chavez avec un ami français du Monde Diplomatique, on nous demanda notre avis sur la situation en Europe. Un mouvement vers la gauche était-il possible ? Nous répondîmes avec le ton déprimé et pessimiste qui caractérisait les premières années du 21ème siècle. Ni au Royaume-Uni ni en France, ni ailleurs dans l’eurozone, nous ne discernions la possibilité d’une percée politique.

« Dans ce cas, reprit Chávez avec un regard pétillant, nous pourrions peut-être vous venir en aide ». Il nous rappela l’époque de 1830 où les foules révolutionnaires arboraient dans les rues de Paris le chapeau de Simón Bolívar, le libérateur vénézuélien de l’Amérique du Sud qui allait mourir quelques mois plus tard. Le combat pour la liberté, dans le style de l’Amérique Latine, était vu comme le chemin à suivre pour l’Europe.

Paris, 1830. Combat dans la rue de Rohan.

Sur le moment, je fus encouragé mais pas convaincu par l’optimisme de Chávez. Ce n’est qu’à présent que je pense qu’il avait raison; il était bon de nous rappeler qu’Alexis Tsipras, le leader du parti de la gauche radicale grecque Syriza, en visite à a Caracas en 2007, avait posé la question de la possibilité de recevoir à l’avenir du pétrole vénézuélien à bas prix, tout comme Cuba et d’autres pays des Caraïbes et d’Amérique Centrale. Il y eut ce bref moment où le maire Ken Livingstone et Chávez manigancèrent un accord pétrolier prometteur entre Londres et Caracas, rompu ensuite par Boris Johnson.

Plus important que la prospection de pétrole bon marché, il y a le pouvoir de l’exemple. Chávez s’est engagé au tournant du siècle, et même auparavant, dans un projet qui rejette les politiques néo-libérales affligeant l’Europe et une grande partie du monde occidental. Il s’est opposé aux recettes de la Banque Mondiale et du Fond Monétaire International et a bataillé avec force contre les politiques de privatisation qui ont abîmé le tissu social et économique de l’Amérique latine et avec lesquelles l’Union Européenne menace à présent de détruire l’économie de la Grèce. Chávez a renationalisé les nombreuses industries, dont celles du gaz et du pétrole, qui avaient été privatisées dans les années 90.

Les paroles et l’inspiration de Chávez avaient eu un effet au-delà du Venezuela. Elles ont encouragé l’Argentine à dénoncer sa dette; à réorganiser son économie par la suite et à renationaliser son industrie pétrolière. Chávez a aidé le bolivien Evo Morales à administrer ses industries du gaz et du pétrole en faveur de son pays plutôt que des actionnaires étrangers, et plus récemment à stopper le vol par l’Espagne des profits de sa compagnie de l’électricité. Par-dessus tout il a montré aux pays d’Amérique Latine qu’il existe une alternative au seul message néo-libéral transmis sans fin depuis des décennies par les gouvernements et les médias rivés à une idéologie dépassée.

C’est l’heure où ce message alternatif doit être entendu plus loin encore, doit être écouté par les électeurs d’Europe. En Amérique Latine, les gouvernements qui mettent en oeuvre une stratégie alternative ont été élus et réélus constamment, montrant son caractère efficace et populaire. En Europe, les gouvernements de quelque couleur que ce soit qui appliquent le modèle néo-libéral semblent chuter au premier obstacle, montrant que la volonté du peuple ne suit pas.

Lord Byron (Londres 1788- Messolonghi 1824)

Si Chávez et ses coreligionnaires de la nouvelle “Révolution Bolivarienne” ont appelé à un « socialisme du 21ème siècle« , ce n’est ni pour revenir à une économie à la soviétique ni pour continuer l’insipide adaptation social-démocrate du capitalisme, mais comme l’a décrit le président de l’Équateur Rafael Correa, pour rétablir la planification nationale par l’État « en vue du développement de la majorité du peuple « . La Grèce a une occasion merveilleuse de changer l’Histoire de l’Europe et de lancer en l’air ses chapeaux de Bolivar comme le firent les Carbonari italiens à Paris il y a tant d’années. Lord Byron, qui avait l’intention de s’établir dans le Venezuela de Bolivar avant de faire voile pour contribuer à libérer la Grèce, baptisa son bateau « Bolívar »; nul doute que les évènements contemporains lui auraient plu.

Londres, le 16 mai 2012.

URL de l’original (anglais) : http://www.guardian.co.uk/commentisfree/2012/may/16/hugo-chavez-lessons-europe-greece

Traduit de l’anglais par Thierry Deronne

URL de cet article : https://venezuelainfos.wordpress.com/2012/05/19/le-chapeau-de-bolivar-ou-les-lecons-deconomie-de-chavez-pour-leurope-par-richard-gott-the-guardian/